Le choix du lieu d'implantation du pré-verger
Le choix de la parcelle où le verger sera planté est primordial. Les facteurs locaux (climat, sol, exposition) conditionnent définitivement le devenir du verger, en particulier sa productivité fruitière. Il peut être utile de rechercher des témoignages sur la présence et la localisation d'arbres fruitiers dans le passé.
Des situations à privilégier
Les zones aérées sont préférables afin de réduire le développement des champignons (maladies cryptogamiques : tavelure…) sur les arbres. Toutefois, le pré-verger doit être abrité des vents forts et implanté en dehors des courants d'air fréquents.
Les parcelles planes offrent un ensoleillement optimum tout au long de la journée (photosynthèse) qui favorise la vigueur des arbres et la qualité gustative des fruits (taux de sucre, etc.). Les parcelles peu pentues et orientées au sud conviennent aussi très bien. Privilégier alors l'orientation au sud-est du pré-verger : les premiers rayons du soleil réduit la rosée sur les feuilles et les fruits (réduction des maladies cryptogamiques) et réduit la durée du gel matinal.
Points de vigilance relatifs à la situation de la parcelle :
- Éviter les situations ombragées et humides, ou à eaux stagnantes ;
- Ne pas planter sur les sols superficiels (faible réserve hydrique) ;
- Éviter les parcelles très exposées au vent (sommet de coteaux, couloir de vent…) ;
- Attention aux situations gélives (bas-fond, exposition au nord-est…) ;
- Les parcelles trop pentues rendent la mécanisation difficile (fauche, récolte des fruits) et posent des problèmes de sécurité lors des interventions de taille.
Une implantation pratique et rationnelle
Le positionnement du verger au sein de l'exploitation mérite réflexion compte tenu de son incidence sur l'organisation du pâturage.
Il est conseiller d'éviter d'implanter le verger près des étables, car ces parcelles sont souvent destinées au pâturage des gros bovins (vaches laitières, bœufs) incompatibles avec les jeunes arbres.
Planter prés de la ferme d'habitation ou d'un chemin fréquemment emprunté par le producteur facilite la surveillance du pré-verger, décisive quand les arbres sont jeunes (pression du cheptel, bon état des protections…).
Nature du sol
De manière générale, les arbres de plein vent sont davantage tolérants sur la nature du sol que les vergers spécialisés (basse tige). Toutefois, chaque espèce fruitière a ses propres exigences.
Une seule règle ne souffre d'aucun compromis : exclure les sols hydromorphes et compactés.
Espèce |
Exigences vis-à-vis de la nature du sol |
---|---|
Pommier franc |
N'apprécie pas les sols compacts ou peu perméables. Prospère dans les sols frais, sains, aérés et bien drainés. S'adapte à de nombreux sols (limoneux, argileux, argilo-calcaire, sableux...), même peu profonds. Affectionne les sols calcaires, avec moins de 15 % de calcaire actif cependant. |
Poirier franc |
Mêmes exigences que le pommier, mais son système racinaire plongeant lui permet de supporter les sols plus secs et aussi plus humides. Meilleure venue dans les sols profonds. Souffre souvent de carence ferrique en sol calcaire. |
Prunier |
Supporte les sols lourds et humides défavorables au pommier. |
Cerisier |
Affectionne les sols bien drainés. Ne supporte pas l'hydromorphie. Vient bien sur les limons, notamment limono-argileux. Indifférent au calcaire. Tolère les sols lourds (argilo-limoneux). Ne supporte pas les sols trop légers (sablo-limoneux). |
L'arbre fruitier de plein vent valorise bien les prairies permanentes, qui ne sont généralement pas implantées sur les meilleures parcelles de l'exploitation. Les sols trop riches (ex. : sols limoneux profonds) sont d'ailleurs peu conseillés, car l'excès de végétation nuit à la teneur en sucres des fruits, et donc à la qualité des produits cidricoles (cidre, jus de fruits…). Certains producteurs des A.O.C. "Pays d'Auge" et "Pommeau de Normandie" privilégient les sols caillouteux et argileux (sols "argiles à silex") et évitent les fonds de vallées humides.
Le porte-greffe franc s'impose en verger de pommiers
Le choix du porte-greffe est essentiel pour la réussite future du verger. Il existe de nombreux porte-greffes sur le marché, mais peu conviennent réellement à la conduite en haute tige.
Les porte-greffes à faible vigueur (M 9, M 106, M 7) sont réservés aux vergers basse tige. Ceux à vigueur moyenne, comme Doucin de Fontenay (M 2) ou le M 111, forment des arbres de demi-tige (tronc de 1,60 m) incompatibles avec le pâturage.
Le porte-greffe dit 'Franc' est préférable à bien des égards : vigueur inégalée idéale en haute tige, très bon ancrage racinaire, maturité retardée du fruit qui améliore sa conservation. Le Noir de Monton (M 24) est une alternative possible.
Porte-greffe de pommiers |
Intérêts |
Limites |
Remarques |
---|---|---|---|
Franc =issus de semis (Bittenfelder)
|
- indemne de virus. - Enracinement robuste. |
- entrée en production tardive (10-12 ans). - sensible à la pourriture du collet en terrain humide. |
Adapté à la plupart des sols. |
Noir de Monton (M 24) |
- mise à fruit plus rapide (8-10 ans). - peu sensible à la chlorose ferrique et au pourridié laineux. |
- vigueur légèrement inférieure au franc. |
Alternative possible au Franc |
M 25 |
- fruits de calibre supérieur au franc. - bonne compatibilité avec la plupart des variétés |
- sensibilité aux viroses |
Mieux adapté aux sols limoneux. |
Espacer suffisamment les arbres fruitiers
Planter les arbres fruitiers trop près les uns des autres est une erreur majeure qui se manifeste tardivement quand les houppiers des arbres devenus adultes (15-18 ans) sont proches, voire se touchent. Les arbres se trouvent alors en concurrence directe pour les ressources naturelles (lumière, eau, minéraux du sol…) ce qui altère leur croissance et la production fruitière.
Le manque d'espacement favorise aussi le développement des parasites (insectes ravageurs) dans le verger et la propagation des maladies (champignons, viroses,…) entre les arbres.
Un pré-verger aéré améliore l'ensoleillement des arbres, et donc la meilleure fructification des branches latérales, la qualité des fruits (composés organoleptiques, teneur en sucre, calibre supérieur…).
Pour chaque espèce fruitière, le tableau suivant donne les valeurs indicatives des distances de plantation qu'il est souhaitable de respecter.
Distances de plantation conseillées en haute tige :
Espèce sur franc |
Distance sur le rang |
Distance entre rang |
Densité usuelle |
---|---|---|---|
Pommier |
10 à 12 m |
10 à 12 m |
90-100 arbres/ha |
Poirier |
10 à 12 m |
10 à 15 m |
70-80 arbres/ha |
Cerisier |
10 à 12 m |
12 à 15 m |
70-80 arbres/ha |
Prunier - Mirabellier |
7 à 10 m |
10 à 14 m |
100-120 arbres/ha |
Noyer |
12 à 14 m |
15 à 18 m |
40-50 arbres/ha |
Points de vigilance : Bien aménager le pré-verger
- Planter les arbres selon des lignes (rangées) régulièrement espacées facilite les interventions mécaniques (engins de fauche, récolte des fruits…) ;
- Orienter, si possible, les lignes de plantation selon l'axe Nord-Sud pour un ensoleillement plus homogène du houppier.
- Simplifier l'organisation du pré-verger : un rang pour une espèce facilite l'entretien des arbres (taille, surveillance sanitaire, période de récolte).
- Regroupant les variétés selon leur période de récolte permet d'éviter les pertes de temps et les circulations (risque de tassement du sol à l'automne, etc.).
- Eviter de planter à moins de 7 m du bord de la parcelle pour faciliter le passage des engins agricoles (fauche, récolte, etc.) en périphérie du verger.
Bien choisir ses variétés
La sélection des variétés est une étape décisive du projet qui dépend des objectifs et des priorités du producteur : type et diversité de produits, période de récolte, durée de conservation, etc.
Le choix variétal est également conditionné par le mode de commercialisation (vente directe, circuit long) et de production envisagé (produit fermier, agriculture biologique…). Il est peut être intéressant de tenir compte des potentialités de valorisation par le biais de contrat de production. Certains cahiers des charges (AOC, marque…) listent les variétés autorisées.
En verger traditionnel, le choix doit se porter sur des variétés rustiques, résistantes aux maladies, et bien adaptées au climat et au sol. Il existe de nombreuses variétés locales intéressantes pour la production cidricoles.
Il est important d'implanter une large palette de variétés, que ce soit pour la qualité des produits (variétés douces, amer, acides) ou pour limiter les impacts du risque de gel (étalement de la floraison). Un verger traditionnel est généralement composé de plus de 15 variétés.
Ne pas hésiter à se renseigner auprès d'organismes techniques et des associations pomologiques régionales ou locales qui disposent de connaissances sur les qualités et leurs utilisations des variétés anciennes.