Production de vanille en sous-bois sans intrants
LA DÉMARCHE
Berceau de la production de vanille depuis son introduction en 1819 par le capitaine Philibert et le botaniste Perrotet, cette Vanilla planifolia, liane grimpante herbacée (monocotylédone, hémi-épiphytes*, famille : Orchidaceae, sous famille Vanilloideae), est une culture importante à La Réunion. Cette orchidée n’a pas la possibilité de réaliser sa fructification de manière naturelle. En effet, originaire du Mexique, seule l’abeille Mélipone du Mexique a cette capacité. A La Réunion, le procédé de pollinisation manuelle a été découvert par un jeune esclave Edmond Albius en 1841. Par la suite, les procédés de préparation de la vanille quant à eux ont été élaborés par deux producteurs réunionnais, Ernest Loupy et David De Floris. Ces procédés ont permis aux gousses de vanille de développer pleinement leur arôme sans se fendre ne diminuant pas ainsi leur valeur commerciale.
Grâce à ces découvertes, il existait 1500 producteurs de vanille en 1848 contre une centaine en 2014. Aussi rentable que la canne à sucre à cette époque, culture emblématique et largement produite à La Réunion, l’île fût la plus grande exportatrice de vanille jusqu’au début du XXe siècle, atteingant des records d’exportation vers la fin du XIXe siècle.
Au cours du temps, les surfaces en vanille ont oscillé et se sont réduites ainsi que les modes de production diversifiés.
Produite soit sur les laves récentes, soit en inter rang de la canne à sucre, la baisse des prix de la vanille et la sécurité des débouchés de la canne a amené à reléguer cette production aux sols impossibles à mettre en valeur en canne à sucre. Fortement conditionnée par les réformes agraires et foncières, spécifiques à La Réunion, la vanille de plein champ a été remplacée par des cultures plus rentables telles que la banane ou l’ananas. Dans les années 1990, 40 à 50% de la vanille était produite en sous bois contre 90% aujourd’hui (Demené, 2013).
Avec des volumes de production fortement réduits tout comme les prix réduits de moitié dans les années 2000, cette forte diminution de la production de vanille peut être liée à divers facteurs : la mécanisation de la récolte de la canne à sucre gêné par l’inter – rang en vanille, ou encore les blessures sur les lianes de vanille liées aux variétés de canne à sucre au bord plus coupant.
Dans la partie Est comme dans les alentours de Ste Rose, des concessions de vanille sont toujours présentes comme au Petit Brûlé, à l’Anse des cascades, ou encore à Bois Blanc, site de l’exploitation des Donnay. L’accès au foncier et l’utilisation d’intrants sur des sols peu productifs créé un fort endettement des actifs agricoles les poussant à arrêter la canne à sucre dans cette partie de l’île et s’orienter vers la vanille en sous bois, couplé à une pluriactivité ou / et des indemnités.
Selon les derniers chiffres publiés par la DAAF Réunion, les surfaces en vanille étaient de 250 ha en 2014 soit 0,4% de la surface cultivée du département. Ces surfaces sont concentrées sur les côtes est et sud-est de Ste Suzanne à St Jospeh. La production totale de vanille verte est de 20 tonnes soit 4 tonnes de vanille noire pour environ 150 producteurs recensés.
Les volumes de production de vanille ont donc fortement diminué au cours du temps. Toutefois, cette production représente un enjeu majeur pour l’île puisqu’elle ne permet pas de répondre à la demande toujours croissante. De plus, La Réunion fait face à une sérieuse concurrence notamment par la production malgache. Les importations de l’île voisine représentent 10 tonnes et montrent souvent des critères de qualité bien en deçà de celle de La Réunion.
La filière vanille s’organise autour de la :
- SCA Provanille : coopérative qui regroupe 92 producteurs à l’orignie de la mise en place de l’IGP Vanille de La Réunion
- La vanilleraie : opérateur privé avec une trentaine de producteurs
- Les autres acteurs indépendants ou regroupés sous forme d’association
La culture de la vanille s’effectue aujourd’hui sous les modes de production suivants :
- Plein champ
- Sous ombrière
- En sous bois
Dans ce contexte et grâce à la mise à disposition d’une concession d’un peu moins de 5 ha par le Conservatoire du littoral, la famille Donnay produit aujourd’hui de la vanille en sous bois, sans intrants et de haute qualité, sur une surface de 1,02 ha. Un surface qui s’agrandira au fil de la restauration écologique. Les deux dernières productions ont permis de produire environ 100 kg de vanille verte sachant que le dernier cyclone a impacté la production (-50%) s’élevant à 33kg en 2023.
Lors de la restauration, les Donnay ont réimplanté entre autres 1500 palmistes rouges servant avec d’autres arbres indigènes, de tuteur à la Vanille.
Les Donnay ont su favoriser cette biodiversité originelle qui semble bien répondre aux divers aléas climatiques ainsi qu’aux nombreuses maladies telles que la fusariose de plus en plus présente sur l’île. Ce système agroforestier, très diversifié est une parcelle que l’on peut considérer aujourd’hui comme référence de part : le défrichement manuel des pestes végétales, la non utlisation d’intrants chimiques, aucune fertilisation exterieure, maitrise et sensibilisation des savoir-faire ancestraux, adaptation au changement climatique, production et préparation de vanille de qualité et bien sur conservation et favorisation de la biodiversité indigène et endémique.
Site de Bois Blanc – Entrée de la concession
LES SAVOIRS AGROÉCOLOGIQUES
Les Donnay suivent un itinéraire technique bien déterminé tant pour la culture de la vanille que pour la biodiversité. Travailler avec le vivant nécessite de bien connaître son environnement. Afin d’obtenir et conserver un système diversifié durable, diverses pratiques sont mises en place.
Il est important de préciser que pour produire une gousse de vanille, il faut compter entre 3 et 5 ans. En effet, environ 2 à 3 ans sont nécessaires avant les premières floraisons, 9 mois entre la polllinisation et la récolte des gousses et encore quelques mois pour la préparation et le séchage.
Préparation des parcelles et choix des tuteurs
En premier lieu, au sein de cette concession de 4,93 ha, plusieurs parcelles ont été déterminées afin de défricher par étape et stabiliser le milieu. Généralerement, ce défrichement s’accompagne de replantation d’espèces indigènes et endémiques grâce à plusieurs « nurseries » réparties sur la concession. Cette pratique permet d’éviter de trop grande trouées qui favoriseraient la repousse des EEE, et d’anticiper les futurs tuteurs pour la vanille. A titre d’exemple, en 10 ans, 1500 palmistes rouges ont été plantées et participent à la production de vanille mais aussi du palmiste avec son chou, source aussi de revenus. La recherche de tuteur droit et le plus résistant possible au cyclone est essentielle. Le palmiste rouge semble donner de bonnes réponses, il permet également une bonne alternance soleil (hiver austral) / ombre (été austral), une meilleure ventilation de la parcelle. Au fil du temps, Quentin remarque un meilleur état sanitaire des vanilles, une bonne productivité et une amélioration de l’opération du bouclage de la vanille.
Parcelle de vanille / palmiste rouge
De fortes pentes occupent le terrain, il est donc nécessaire de limiter l’érosion et de conserver au maximum ce sol jeune en formation. Pour cela, aucune souche d’arbres ou d’arbustes exotiques envahissants n’est déracinée lors du défrichement.
Couverture permanente du sol
Toute la biomasse issue de la coupe est retournée entièrement au sol. Par la suite, autour de chaque tuteurs, un couvert permanent est installé pour limiter les espèces herbacées envahissantes telles que le tabac bœuf. De plus, l’élagage des palmistes est relativement facile et permet d’alimenter ce couvert permanent.
Le couvert autour du tuteur est composé de rondins de bois en décomposition, de paille sèche de palmistes et de petits bois. La biomasse issue du débroussaillage des « adventices » est retournée également au sol. Toutes cette matière permet de mieux gérer le travail de désherbage mécanique.
Les inter rangs sont eux aussi couverts par un couvre sol indigène. Les Donnay expérimentent et s’orientent vers des couverts de fougères et d’impatiente, montrant de bons résultats contre la pression des EEE.
La densité des lianes n’est pas très importantes ce qui limitent la propagation de maladies soit 1000 lianes à l’ha.
Ce système agroforestier hautement diversifié permet également de conserver des conditions locales favorables à l’adaptation aux aléas climatiques.
L’illustration réalisée par Eleonore Donnay sur les hauts de ses 12 ans permet de bien résumer les avantages de l’association palmiste rouge et vanille.
Ce travail demande un certain engagement et une bonne organisation. En effet, comme le temps des premières floraisons des vanilles est long, il faut dans le même temps implanter les lianes dès que cela est possible.
Sélection des lianes – mères de vanille
Les Donnay n’achètent aucune liane de vanille.
En effet, dans le Grand Brûlé au pied du Piton de la Fournaise, à proximité de la concession de Bois Blanc, la vanille pousse à l’état naturel. Les Donnay ont une autorisation délivrée par l’ONF depuis plusieurs années pour aller chercher des lianes en forêt dans cette zone géographique bien précise.
Étant donné les problématiques d’espèces envahissantes exotiques, les lianes vont pousser sur des tuteurs exotiques comme le goyavier mais n’influence pas la qualité de la vanille.
Les lianes semblent espacées les unes des autres et on observe des longueurs différentes d’une liane à l’autre tout comme leur diamètre et leur vigueur. Les Donnay cherchent des lianes ou « bout-pendant » de l’année à fort potentiel végétatif. Des lianes saines (si possible sans maladies), vigoureuses, non – cannelées dont le diamètre est compris entre 10 et 14 mm et des entre-nœuds de 12 à 15 cm. Généralement ceux sont des lianes qui n’ont jamais produit puisque la fécondation est manuelle. Il arrive qu’en milieu naturel, cette fécondation puisse quand même avoir lieu par l’intermédiaire d’un oiseau par exemple mais c’est très rare.
Les Donnay cherchent également une liane qui n’est pas totalement verte avec des feuilles larges, constat d’une surface photosynthétique plus importante.
Une fois la liane repérée et sélectionnée, les Donnay prélèvent une bouture moyenne à longue (maximum 1,5m de longueur) comptant plusieurs nœuds qui pourra être recoupée si besoin. La bouture peut être prélevée sur les deux extrémités mais les Donnay préfèrent intégrer la terminaison feuillue apicale avec à minima deux feuilles enroulées en cornet : le cœur de la vanille.
Ce prélèvement est effectué à l’aide d’un simple ciseau et d’une machette pour évoluer dans la forêt. Si possible par temps sec, car la liane de vanille est très fragile. Par temps de pluie, la liane se gonfle et devient très cassante. A noter qu’après la coupe de prélèvement, la vanille qui est charnue (tiges et feuilles) possède un suc transparent et irritant pouvant provoquer des brûlures et des démangeaisons persistantes. Il est conseillé de ne pas être en contact avec ce suc.
Une fois prélevée, la bouture est enroulée et attachée à l’aide de « ficelles » issues des feuilles de vacoa. Cela permet de faciliter le transport. Les boutures sont ensuite insérées dans un grand panier lui aussi issu du vacoa qui permet de garder une certaine humidité ou fraicheur pour la vanille.
Une fois ramenées de la forêt, les boutures sont déroulées, posées au sol et choyer une par une.
1/3 des feuilles sont coupées pour ne pas fatiguer la liane ainsi que les racines crampons, l’équivalent des 3 à 5 premiers nœuds de la partie basale destinée à l’enracinement.
Elles sont également bien observées afin de s’assurer qu’elles ne sont pas malades ou s’il n’y a pas la présence de parasitisme comme les fourmis auquel cas elles seront abandonnées.
Puis, elles sont de nouveaux enroulées et rattachées. Elles sont positionnées l’une à côté de l’autre dans le noir, en couronne, en attendant les premières ébauches de racines. Ce ressuyage permettra une nouvelle fois de sélectionner les meilleures lianes.
Généralement, la sortie des racines est plus longue en hiver austral (6 à 8 jours) qu’en été austral (2 à 4 jours). Une fois les racines sorties, elles sont prêtes à être transplantées en forêt.
Sélection des lianes de vanille en attente des premières racines
Vacoa : Pandanus utilis est une plante de la famille des Pandanacées. Angiosperme monocotylédone de taille relativement importante. Originaire et endémique des Mascareignes, ce n’est ni un arbre, ni un palmier. Il peut atteindre entre 15 et 20 m de hauteur, il est très présent près des côtes pour son effet brise-vent.
Plante multifonction, elle peut être utilisée pour la vannerie et également consommée pour ses fruits : le chou de vacoa ou « pimpins », riche en féculent après cuisson.
Outil essentiel au Donnay car chaque partie de la plante est exploitée comme un intrant naturel et gratuit.
Installation des boutures au champ
Pour garantir des conditions optimales de croissance végétative (température, hygrométrie, substrat naturelle de plantation), les Donnay s’assurent que la parcelle est prête à recevoir les lianes – mères. Les opérations de nettoyage des EEE, d’élagage, d’alimentation du couvert permanent sont effectuées régulièrement.
Les boutures sont ensuite transportées sur la parcelle et la mise en place se déroule ainsi :
- On creuse une petite tranchée (3 à 5 cm de profondeur) du centre vers l’extérieur du carré formé par la couverture permanente
- On dépose la liane au tuteur de façon à ce que les nœuds effeuillés de la base soient plaqués dans le mulch et que le dernier nœud effeuillé soit au pied du tuteur
- On attache la liane grâce au fibre naturelle du vacoa contre le tuteur au niveau du dernier nœud effeuillé et puis tout au long des nœuds vers le sommet de la liane
- On recouvre le bout déposé dans la tranchée en laissant dépasser vers l’extérieur la plaie cicatrisée de la coupe basale afin d’éviter les infections.
Gestion des lianes
En phase de croissance et de production, la liane de vanille ne doit pas excéder une hauteur maximale de 2m à 2,30m afin de faciliter le travail à hauteur d’Homme (photo1).
Un noeud de vanillier comporte :
- 2 racines crampons (photo2)
- 1 feuille avec 1 œil à son aisselle (photo3)
- 1 œil unique qui produit : soit 1 seul bourgeon végétatif (possibilité de produire une nouvelle liane), soit 1 seul bouton floral qui produit une inflorescence
- 1 œil qui a donné un bouton floral ne pourra plus donner de bourgeon végétatif et inversement
Couplée aux conditions climatiques, la structure des plants de vanille joue un rôle important sur la santé et la vigueur des vanilliers sur la durée. Deux opérations sont essentielles afin de donner une structure saine (toilettage) et adéquat (bouclage) tout au long de l’évolution et de la production de la vanille. La densité des plants (1000 lianes / ha), l’objectif de rendement et l’ombrage sont cruciaux afin d’éviter les maladies cryptogamiques notamment la fusariose.
Fusariose (Fusarium oxysporum f. sp. radicis-vanillae) :
La fusariose se caractérise par une pourriture du système racinaire qui conduit à la perte totale de la liane assez rapidement et une pourriture de la partie aérienne qui elle, conduit à la perte d’une partie de la tige infestée et à la chute des gousses de la partie infectée.
Les Donnay constate que cette maladie est présente sur les différentes parcelles à des degrés divers mais n’excédent pas les 40% d’infestation. Ce chiffre est à relativiser puisque la fusariose est présente en permanence dans les parcelles mais se développe et devient pathogène avec de mauvais choix de pratiques.
Ainsi les Donnay s’adaptent avec la gestion de la densité, la gestion de l’élagage en fonction des conditions climatiques (ombrage optimal entre 40 et 60%), le toilettage.
Pour l’instant, il ne constate pas de dommages significatifs contrairement à d’autres producteurs.
Le sujet est préoccupant dans tout l’Océan Indien et sur d’autres types de cultures comme la canne à sucre.
Le toilettage :
Opération récurrente sur l’ensemble des vanilliers, le toilettage consiste à retirer les feuilles endommagées, les vieux bouts de lianes sénescents, les parties qui deviennent improductives.
Lors de l’induction florale, tous les boutons floraux ne sont pas gardés. En effet, en production intensive, la liane peut dépérir au bout de 3 ans. Les Donnay ont fait le choix de garder uniquement 9 à 12 boutons sur chaque liane afin de pérenniser la liane dans le temps. Le renouvellement des lianes peut se faire ainsi tous les 12 à 15 ans et obtenir de bons résultats tant en termes du nombre de gousses par grappe, que de la qualité de la production et du produit fini.
Le bouclage :
Préparation pour le bouclage
Le bouclage est une opération qui permet de renouveler la capacité végétative du vanillier et de travailler dans de bonnes conditions. Cela consiste à ramener une partie de la liane au sol en faisant une boucle :
- on pré coupe les racines crampons les plus robustes, les plus proches afin de toiletter une partie de la liane qui va etre bouclée;
- à l’aide d’un bois de gaulette dont l’extrémité est taillé en V, on détache l’ensemble des racines crampons le plus délicatement possible;
- on s’assure de soulager la liane pour qu’elle ne casse pas, la vanille est délicate et capricieuse;
- une partie de la boucle est déposée dans le mulch au pied du tuteur en ayant toiletter feuilles et racines de la partie enfouie pour éviter les pourrissements. Cela permet également de favoriser l’apparition des racines nourricières et peut être générer une nouvelle liane;
- la partie supérieure de la boucle est ensuite attachée à l’aide de la fibre de vacoa en laissant la partie apicale en hauteur.
La maitrise du bouclage est un gage de réussite de la production de vanille. Les Donnay apportent une attention particulière à cette opération. La vanille tend naturellement à monter sur son tuteur pour aller chercher la lumière.
L’effet du palmiste rouge, tuteur long, permet un bouclage long et une meilleure productivité. La boucle est suffisamment longue pour maximiser la photosynthèse et permettre un bon enracinement.
Cette façon de procéder permet aux Donnay de travailler à hauteur d’hommes dans un terrain pentu et de boucler sur le même tuteur.
Cette technique peut s’opérer plusieurs fois par an car si la liane n’est pas bouclée elle se fatigue dès la première année de production. En revanche, si cette opération est pratiquée trop souvent, elle réduit la productivité de la liane.
Induction florale
Boutons floraux
La première année de production arrive au bout de 2 à 3 ans sur les parcelles des Donnay.
La floraison ou induction florale se déclenche avec la baisse des températures en début d’hiver austral, la réduction des pluies. Très sensible au stress thermique, l’induction florale peut s’étaler de juin – juillet à aout - septembre.
Dès que l’ensolleillement devient plus prononcé, que l’on peut accentuer par élagage des tuteurs, les boutons floraux apparraissent. Les Donnay ne les garderont pas tous pour ne pas fatiguer la plante et accroitre son temps de vie.
A partir de ce stade, dès que les premières fleurs apparaissent, la pollinisation peut commencer.
Pollinisation
Après la sélection des boutons floraux, les fleurs ou inflorescences apparaissent. Elles sont éphémères et ne durent qu’une journée maximum. La pollinisation est subtile et s’effectue chez les Donnay avec une épine de palmiste rouge juvénile. L’avantage est que cette aiguille ne colle pas et ne gêne pas la pollinisation de plusieurs fleurs.
3 étapes se distinguent pour polliniser une fleur de vanille (cf vidéo) :
- Déchirer le labelle (pétale inférieure recourbée) à l’aide d’une épine
- On soulève le stigmate qui sépare les étamines (organe femelle), très doucement, afin de le cacher sous l’organe mâle nommé anthère
- On appuie avec le pouce pour mettre en contact les deux organes
- Les Donnay indique qu’il ne faut pas enlever les fleurs non – pollinisés ou non fécondées car cela peut blesser la liane et être une entrée pour diverses maladies et éviter des dégâts sanitaires.
A l’issue de cette opération, de l’ordre de plusieurs centaines de fleurs par jour, la gousse de vanille atteint sa taille adulte au bout de 2 mois environ (40 à 60 jours). Et il faudra attendre 8 à 9 mois supplémentaire pour que la gousse arrive à maturité.
Récolte
La récolte est sélective et s’applique gousse par gousse en fonction de la maturité.
La gousse perd de sa brillance et son extrémité inférieure devient jaune. Lorsque cette extrémité atteint la « bonne couleur », les Donnay procède à la récolte de la gousse.
Généralement, la récolte est étalée dans le temps.
Les gousses peuvent être de longueur différente comprise entre 15 cm et + de 24 cm.
En 2023, la récolte atteint 33 kg. Rendement faible comparé aux autres années, ceci est essentiellement dû à l’impact du cylcone Belal et à la variablité climatique qui en a découlé.
Toutefois, il est important de préciser que les rendements moyens des Donnay s’échelonnent autour des 40 à 50 kg /an avec des années pouvant atteindre plus de 100 kg de vanille verte. Malgré les variations, la culture de la vaninlle reste une culture rentable à cette échelle.
La diversification de la concession et la vente d’autres produits permet de palier à ces variations.
Itinéraire technique de la vanille en sous-bois
Itinéraire technique de la vanille en sous - bois - 2023 / 2024
Préparation de la vanille
Les Donnay ont fait le choix de ne plus mortifier la vanille c’est à dire procéder à son échaudage et étuvage. En conditions de préparation naturelle, cette phase est très importante pour obtenir le résultat escompté et comporte de nombreux secrets, quelques fois partagés avec certains préparateurs confirmés.
Les Donnay préparent donc la vanille en la séchant naturellement avec une alternance, comme à la production, d’ombre et lumière. L’objectif des Donnay est d’obtenir une vanille de haute qualité.
De manière générale, les gousses sont disposées sur un grand tamis à l’air libre permettant une bonne aération des gousses, à certaines heures de la journée. Observées régulièrement, chaque gousse est soignée pour éviter qu’elle se fende et qu’elle ne sèche trop, ce qui lui donnerait un aspect frippée.
La grande majorité de la production est conditionnée dans des tubes ou en fagot pour la vente directe, en circuit court.
Le taux de vanilline n’est pas connu mais estimé bien supérieur à 2%, ce qui permet d’obtenir une vanille dite givrée et d’excellente qualité.
Exemple de gousses de vanille givrée en tube préparées par les Donnay – Production AB – Estampillée Esprit parc national
Zoom sur la marque Esprit parc national
Le Parc national de La Réunion, créé en mars 2007 couvre une superficie de 105 477 ha soit 42% de la superficie de l’île. Il comprend les différents cirques et surtout le volcan Piton de la Fournaise. Une de ses missions principales est de protéger les différentes espèces endémiques de ce haut lieu de la Biodiversité qu’est l’île de La Réunion. Il abrite 94% de la biodiversité du territoire.
Le Parc intègre deux réserves naturelles déjà existantes : la réserve naturelle de Mare Longue et celle de la Roche écrite.
Maison du Parc national de La Réunion
La zone Cœur du Parc national de La Réunion est inscrite depuis 2010 au patrimoine mondial sous l’appellation : « pitons, cirques et remparts de l’île de la Réunion et le Parc a le rôle de gestionnaire du bien ».
Comme l’ensemble des Parcs nationaux, le Parc national de La Réunion a construit une Charte proposant différents objectifs de protection et de valorisation pour le « cœur du Parc » et de développement durable pour les aires d’adhésions.
La Charte s’organise autour de 4 enjeux majeurs :
- Préserver la diversité des paysages et accompagner leurs évolutions
- Inverser la tendance à la perte de biodiversité
- Valoriser le patrimoine culturel des Hauts et assurer la trasnmission de ses valeurs
- Impulser une dynamique de développement économique pour les Hauts
Afin de limiter la perte de Biodiversité et préserver l’endémisme de l’île, le Parc national, doté d’agents de terrain, accompagne les vanilliers notamment dans la forêt de Bois Blanc pour concilier lutte contre les EEE, et limiter la perte de biodiversité tout en ayant une production agricole et une valorisation économique des exploitations et des territoires.
L’accompagnement du Parc pour la mise en place de certaines MAEC, notamment dans la forêt de Bois Blanc, permettent aux agriculteurs de répondre aux exigences en matière de préservation de la biodiversité indigène et aussi endémique.
Par exemple, des visites sont organisées avec les agents du Parc afin de réaliser des inventaires (arbres, fougères, etc…) et accompagner les agriculteurs vanilliers à mieux comprendre les enjeux de la restauration écologique et la biodiversité présente tout en produisant de la vanille et des fruits lontan avec des pratiques respectueuses de l’environnement.
La marque « Esprit parc national » a été créé en 2015 et adopter par les 11 parcs nationaux français. Cette marque a pour but de soutenir les différentes activités, qu’elles soient économiques, touristiques ou encore agricoles. Elle s’inscrit dans le respect et la valorisation des patrimoines locaux des Parcs nationaux.
Cette marque garantit un mode de production responsable et écologique, une origine locale et l’authenticité des produits proposés.
La marque Esprit parc national est une marque déposée et propriété de l’Office Français de la Biodiversité – OFB.
Les valeurs principales soutenues par la « marque Esprit parc national sont :
- L’engagement : pour préserver la biodiversité
- L’authenticité : des traditions et des savoir-faire locaux
- Le respect : de la nature exceptionnelle, du patrimoine culturel et des populations
- Le partage : autour d’une marque commune à tous les Parcs nationaux de France
- La vitalité : d’un état d’esprit positif, porteur de dynamisme et d’ouverture
Des valeurs que les Donnay partagent au quotidien et s’évertuent à respecter au fil du temps.
En production AB depuis plusieurs années, ils adoptent la marque Esprit Parc national en 2022 pour leur production de vanille en sous-bois. Elle contribue à la reconnaissance du travail remarquable de restauration écologique que les Donnay continuent à appliquer et de préservation de la forêt de basse et moyenne altitude qu’est la forêt de Bois Blanc.
« L’attibution de cette marque à la vanille cultivée en sous-bois permet de créer une marque différenciée, valorisant un mode de production sans intrants chimiques et basé sur le fonctionnement d’un écosystème boisé et les savoir faire perpétués par des générations de vanilliculteurs » (OFB, 2018). »
Afin de bénéficier de la marque, les Donnay doivent respecter le cahier des charges intitulé :
« Esprit Parc national pour les produits issus de cultures agroforestières tropicales ».
Les Donnay vont bien au delà de ce cahier des charges et continuent de s’améliorer afin de réduire encore plus les intrants (volonté d’arrêter le désherbage mécanique avec la débroussailleuse) et renforcer les régulations biologiques et stabiliser un système agroforestier.
Le cahier des charges comprend plusieurs critères :
Des critères généraux : nécessité d’avoir des surfaces en association arbre / culture et de créer de la diversité variétale – des surfaces qui se trouvent sur le parc ou sur son aire d’adhésion – filière courte de valorisation
Des critères thématiques / obligatoires :
« Valoriser et protéger les ressources et les patrimoines du territoire
- Pas de produits phytosanitaires
- Pas d’engrais chimique de synthèse
- Pas d’OGM
- Renouvellement de la diversité végétale
- Limiter l’érosion
- Sauvegarde des variétés locales, menacées ou non
- Intégration paysagère
Ou facultatif :
« Développer une démarche éco-responsable »
- Pas d’irrigation ou peu
- Apports de produits organiques et leur fractionnement
- Transformation sur l’aire du Parc national
- Procédés de transformation en mode développement durable
- Gestion des déchets
- Communication
« Participer à la vie du territoire et à sa promotion »
- Sensibilisation : les Donnay apporte une attention particulière à ce partage notamment par l’intermédiaire de visites pour donner envie et montrer le caractère agroécologique de l’activité, la protection des patrimoines, et préserver les différentes biodiversité qu’elles soient végétales, animales et humaines.
D’autres critères complémentaires sont également présents dans le cahier des charges autour de la démarche éco-responsable liée à la transformation des produits concernés.
Les Donnay par exemple ont arrêté la mortification de la vanille pour un procédé plus naturel et moins consommateurs d’énergie. Ils considèrent que la vanille est un produit vivant notamment par l’obtention d’une vanille givrée. La conservation du produit fini de plusieurs années atteste de son mode de production et transformation naturel.
INTÉRÊTS DU POINT DE VUE DE L'AGRICULTEUR : PRODUIRE DE LA VANILLE EN SOUS-BOIS ESTAMPILLÉe Esprit parc national
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Gérer une vanilleraie se fait 365 jours de l’année. Quentin rappelle que l’on peut toujours mieux faire en termes d’amendement organique, d’élagage, de bouclage, etc…
Les Donnay ont vite compris l’adage : « le mieux est l’ennemi du bien » !
Grâce à leurs observations, il constate et tire parti des stress et carences qui peuvent amener de bons résultats (exemple des végétaux stressés lors de l’induction florale qui peuvent accroitre les rendements).
Quentin indique l’importance d’être réactif, d’anticiper, et d’affiner sa logique et le bon sens paysan.
A titre d’exemple, il rappelle :
- 90% des cyclones ont lieu eu mois de janvier à la Réunion, il paraît opportun de s’assurer que toutes les lianes soient attachées pour prévenir de la prise au vent.
- En été austral, quand les arbres sont en montées de sèves, et que les rayons de soleil favorisent les fortes températures, il est contreproductif de se lancer dans les travaux de défrichage. Il vaut mieux attendre l’hiver austral où ce travail sera plus efficient.
- Le topographie du terrain et le système agroforestier (letchi / vanille) ne permet pas de mécaniser. Toutes les opérations sont manuelles et Quentin et Béatrice, les 2 forces vives, se sont spécialisés dans certaines tâches afin d’être complémentaires et gagner en efficacité (Béatrice nettoie la vanille et la rattache, Quentin amende et désherbe).
Les Donnay rappellent aussi leur vie de famille et comment ils ont appris à lâcher prise de ne pas aller en forêt les jours « les moins rentables » (exemple pour moins de 50 fleurs, ils ne vont pas en forêt polliniser). Cet état d’esprit leur permet de ne plus culpabiliser et de ne pas travailler 7 jours sur 7.