Vulnérabilité des exploitations au changement climatique
Quels sont les aléas climatiques rencontrés ?
Description du climat local
Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2020 (Source : Agri4Cast, JRC)
Les températures annuelles :
La hausse tendancielle des températures annuelles se confirme localement sur la période d'analyse, à l'image de la situation plus générale en France. Cette hausse concerne tous les paramètres (températures moyennes, minimales et maximales) et provoque ici des dégâts sur les légumes (voir plus bas). On observe également une hausse des jours chauds (> 25°C) et des jours très chauds (> 30°C).
La sécheresse :
Le déficit hydrique est la différence entre les précipitations et l'évapotranspiration des cultures, donc grossièrement la différence entre les entrées et sorties d'eau. C'est un bon indicateur pour caractériser la sécheresse. Ici, on observe une dégradation tendancielle de cet indicateur avec des valeurs qui semblent devenir de plus en plus régulières, à l'inverse des années 90 qui étaient plus hétérogènes. La période juin à septembre correspond à la période de sécheresse signalée par l'agriculteur, ces données-là semblent donc confirmer les déclarations de Pierre Besse.
Quelles sont les ressources touchées sur la ferme ?
Pour l'aléa de sécheresse, ce sont toutes les cultures légumières qui sont touchées par le manque d'eau, surtout les tomates, ainsi que les arbres fruitiers. Les fruits brûlent, des coups de soleil apparaissent, notamment sur les noix. Cela impacte donc directement le rendement. Les pertes de rendement sont minimes pour le maraîchage, mais la production fruitière est plus faible. Heureusement, cette production est autoconsommée, ou représente une faible proportion quand elle est commercialisée.
Fortes températures : Les fortes températures en juillet/août viennent accentuer les impacts de la sécheresse. De plus, la chaleur après des épisodes ponctuels de pluie favorise le développement du mildiou, qui touche plusieurs cultures maraichères, mais qui est le plus problématique sur les tomates.
Quelles évolutions climatiques à venir localement ?
L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques locales et illustrent les principaux enjeux climatiques pour un système maraîchage diversifié.
Quatre indicateurs sont présentés en lien avec le système de Pierre Besse :
- Évolution des températures et du déficit hydrique annuel :
Voici les projections à l'horizon 2050 pour la température moyenne et le déficit hydrique annuel. On remarque une franche augmentation des deux paramètres. Ainsi, les aléas de chaleur et de sécheresse semblent globalement avancer dans les 30 années à venir.
La température moyenne estivale :
Ce graphique présente l'évolution des températures moyennes estivales, qui augmentent de plusieurs degrés à l'horizon 2050. Aujourd'hui, les pratiques agroécologiques (mulch, non travail de sol, couverts végétaux) de Pierre Besse minimisent les impacts des fortes températures, mais cette augmentation pourrait peut-être se faire ressentir sur le maraîchage, notamment sur les tomates.
Le stress thermique en août :
Ces graphiques correspondent aux Indicateurs Agro-Climatiques relatifs à la tomate, ils sont donc judicieux pour le système maraîchage diversifié de Pierre Besse, où la tomate est l'une des cultures importantes de l'exploitation. Le premier graphique présente le nombre de jours avec des températures minimales supérieures à 20°C, en août, et le second le nombre de jours avec des températures maximales supérieures à 37°C. L'amplitude thermique du mois d'août sera donc bien plus resserrée, et on peut aller plus loin en supposant que l'écart entre les températures du jour et de la nuit sera donc plus faible, étendant la période de stress thermique sur une plus grande période.
L'évapotranspiration :
Cet indice présente l'évapotranspiration potentielle des plantes, donc ses sorties d'eau dues au climat afin de se thermoréguler, pour les saisons printanières et estivales. Pierre déclare remarquer la sécheresse systématiquement de juin à septembre, et tant qu'il ne pleut pas, l'ETP grimpe d'1 mm/jour en moyenne (d'après ses estimations). D'après cet indice, l'évapotranspiration augmentera effectivement à l'horizon 2050, témoin du stress hydrique auquel les plantes seront de plus en plus soumises. Pierre sera peut-être contraint d'irriguer plus pour pallier ces sorties d'eau.
Quelles sont les pistes d'adaptation chez Pierre et Nicole Besse ?
Contre la sécheresse, Pierre Besse irrigue de plus en plus ces cultures. Il a notamment fait faire un quatrième forage. De plus, la pratique du mulch, combinée aux couverts végétaux et au non-travail du sol permet de garder l'humidité dans le sol (en limitant l'évaporation), et assure également une bonne teneur en matière organique (jusqu'à 7% parfois) des sols. Un tel sol est plus résilient, garde l'humidité et permet une bonne infiltration de l'eau lors de fortes pluies.
Contre les fortes températures, qui favorisent le mildiou notamment, les exploitants traitent les cultures avec du cuivre ou du soufre.
De plus, un système agroforestier sur le jardin pourrait peut-être être intéressant pour apporter de l'ombre, qui réduirait l'impact de la chaleur sur les cultures. Cela permettrait également une meilleure disponibilité en eau.
Pour aller plus loin :
Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt : https://agriadapt.eu/objetives/?lang=fr. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.
A l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.
- Plateforme AWA :