Paillage/mulch
LA DÉMARCHE
Pour relever le défi n°1 en maraîchage de la maîtrise des adventices, Pierre et Nicole Besse combinent différentes techniques :
- paillage / mulch de gazon, de bois broyé, de fanes de légumes et de résidus de désherbage.
- paillage plastique pour une partie des tomates et des cucurbitacées (sur 10 % de la surface en maraîchage).
- désherbage manuel (sarclage, binage).
La pratique de cultures associées et de successions rapides ou emboîtées augmente la part de lumière solaire captée par les cultures au détriment des adventices. Sans être en soi une technique de désherbage, cet élément joue un rôle majeur dans la maîtrise des adventices et dans l'équilibre du système.
Autrefois fréquemment dépassé par les mauvaises herbes, Pierre Besse connaît les risques liés au développement des adventices. Sa démarche se résume aujourd'hui en une phrase : « L'herbe n'est plus un souci, c'est une vigilance ».
LES SAVOIRS AGROÉCOLOGIQUES
Le mulch constitue un des piliers de ce système maraîcher en garantissant le bon fonctionnement du complexe sol-végétation-décomposeurs.
Pour les maraîchers, les bénéfices sont multiples :
- régulation de la pression d'adventices par la couverture du sol (un mulch compact de 5 cm d'épaisseur suffit à inhiber la germination de la quasi totalité des adventices).
- maintien de la fertilité des sols : sur une parcelle mulchée chaque année, la décomposition du mulch s'opère en continu. Elle garantit un très haut niveau d'activité biologique, un excellent état de surface du sol et les meilleures conditions de croissance pour les plantes cultivées.
- Accessoirement, une certaine limitation des besoins en eau (maintien de l'humidité).
Du papier kraft est parfois utilisé sous un mulch quand il s'agit d'étouffer de la végétation vivante sous le mulch.
Toutefois des précautions s'imposent pour l'utilisation de telles matières organiques :
- Le bois broyé peut être à l'origine de problèmes de faim d'azote (blocage de l'activité microbienne en surface et retard au démarrage de la culture). Pour cette raison, le bois broyé peu composté n'est utilisé que sur les vivaces (asperges, artichauts, rhubarbes…) et parfois sur les passe-pieds (zone de pré-compostage). Pour les autres cultures, le bois broyé doit avoir composté au moins deux à trois ans. Cependant, le bois broyé non composté convient très bien pour stabiliser un paillage plastique contre le vent (précompostage).
- Le gazon, tant qu'il n'est pas enfoui dans le sol, n'engendre pas de faim d'azote et ne cause aucun trouble sanitaire. S'il est appliqué alors que la culture est déjà en place, il ne doit pas être chaud au moment de l'application (risque de brûlures sur les feuilles de la culture du fait des émanations d'ammoniac). Quand c'est possible, le mieux est de l'appliquer juste avant la plantation, et de planter à travers le mulch : la pose du mulch est alors très rapide et son efficacité désherbante pendant les premiers stades de la culture est maximale.
- Certaines cultures sont plus difficilement compatibles que d'autres avec un mulch. Par exemple la carotte demande un sol nu et bien affiné pour le semis et est délicate à mulcher une fois démarrée. Nicole et Pierre mènent généralement cette culture de façon traditionnelle, sans mulch, par sarclage et désherbage manuel.
- En mars/avril, le mulch accroît le risque de gelée blanche sur les cultures gélives. C'est le cas pour la pomme de terre, que Nicole et Pierre plantent sur sol nu et ne mulchent qu'après le 20 avril, une fois passés les risques de gelée.
Sur 4000 m2 de surface consacrée aux légumes, chaque année environ 3000 m2 sont mulchés, 500 m2 sont cultivés sur paillage plastique, et 500 m2 sont cultivés sur sol nu et sarclé.
Entre deux cultures, si le mulch est trop décomposé, la planche est reprise par un travail superficiel avec des outils manuels. Cependant il arrive que deux cultures se succèdent sur le même mulch, sans travail de sol.
Itinéraire technique
Tomate – pomme de terre ou tomate – oignons avec implantation d'un couvert végétal à l'inter-saison
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Période |
Interventions culturales |
Outils |
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Octobre |
Arrachage manuel des tomates |
Pas d'outils |
Option 1 Pomme de terre |
Octobre
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Nettoyage soigné de la planche et implantation d'un couvert radis de chine – féverole
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Croc, houe à pousser Semis à la main sur trois rangs |
Mars
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Arrachage manuel du couvert – dépôt de cette biomasse en andain sur l'axe de la planche – Plantation (très superficielle) des pommes de terre de part et d'autre de l'axe |
Passage rapide d'une griffe pour ameublir sur le rang – Plantation à main nue |
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Fin Avril |
Dépôt d'un mulch de gazon le long des rangs de pommes de terre |
Fourche, brouette |
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Option 2 Oignons |
Octobre
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Nettoyage sommaire de la planche puis abandon à la végétation spontanée |
Croc, houe, sarcloir, selon la végétation présente |
Mars |
Nettoyage sommaire et dépôt d'un mulch de gazon, puis plantation des oignons |
Plantation à main nue à travers le mulch |
ZOOM sur Les adventices :
Les maraîchers se donnent deux règles de base :
- Intolérance totale envers les vivaces qui sont éliminées de manière systématique ;
- Ne pas laisser les annuelles grainer (surtout les plus agressives : pourpier, amarantes, chénopodes, graminées d'été...), sauf un petit nombre de plantes jugées compatibles avec les cultures ou même utiles comme couvre-sol (lamier pourpre, luzerne d'Arabie, gaillet gratteron...).
Aujourd'hui, le jardin compte peu de vivaces (seul le liseron fait encore de la résistance) et d'annuelles posant problèmes (sauf le pourpier).
Caractéristiques et points de vigilance pour quelques adventices communes sur le jardin
Adventices |
Caractéristiques et Points de vigilance |
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Luzerne d'Arabie |
Adventice caractéristique des sols riches en MO. Constitue un très bon couvert d'hiver qui sèche spontanément entre mai et juin. Possibilité d'installer au mois de mai des cultures d'été dans son couvert, sans l'éliminer et sans travail de sol. Intéressante aussi sur les passe-pieds, quitte à contrôler son développement latéral en avril / mai. |
Mouron blanc et Véronique de Perse |
Adventices caractéristiques des sols riches en MO. Très couvrants et étouffants en hiver, et relativement faciles à arracher en mars / avril avec les outils manuels. Spontanément très présents en hiver. Peuvent fleurir et produire leurs graines en hiver, et germer toute l'année à peuvent causer des difficultés par la suite au semis d'une culture (carotte par exemple) Vigilance nécessaire |
Lamier pourpre |
Caractéristique des sols riches. Ne se développe abondamment que sur les planches libérées tard, en octobre/novembre. Cause peu de problèmes : sèche spontanément en avril / mai et ne regerme pas avant l'automne. Excellent couvre-sol d'hiver, très facile à détruire et sans risque de nuisances par ses graines. |
Pâturin |
Intéressant sur les passe-pieds : ne gêne pas les cultures, tolère très bien le piétinement et concurrence l'installation d'autres adventices. |
Autres graminées d'hiver spontanées |
Peu présentes en hiver sur les planches libérées tard. Plus abondantes si la planche a été libérée en août / septembre. Capables d'une croissance notable en hiver. Arrachage au croc difficile au printemps. |
Renoncules |
Plusieurs espèces, toutes notoirement bien enracinées et difficiles à arracher. |
Gaillet gratteron |
Ne s'exprime qu'en hiver et au printemps. Manifeste un fort pouvoir de domination sur les autres plantes pendant cette période. Sèche spontanément en juin / juillet. Facile à éliminer. Autorise aussi à planter dans son couvert à partir du mois de mai, en rabattant sa végétation à la main mais sans le détruire. |
Zoom sur le non travail du sol
Conformément aux principes de la permaculture et de l'agriculture naturelle, la limitation des perturbations du sol a toujours été un objectif recherché.
Le choix d'un système en planches permanentes à plat non piétinées a permis de limiter le tassement du sol et a ouvert la possibilité d'un entretien exclusivement manuel. Pierre et Nicole Besse n'utilisent plus d'outils motorisés depuis 10 ans. Ce changement n'a pas eu d'impact négatif sur le temps de travail. Aujourd'hui ils nous disent « On récolte autant et on travaille moins ». Ils ne sont intéressés ni par un motoculteur, ni par un animal de trait.
A côté des planches à plat, de petites buttes de culture ont été dressées, avec un andain de biomasse au cœur (débris de bois, fagots de roseaux, résidus de désherbage, déchets de cuisine...), de la terre rapportée (10 à 15 cm d'épaisseur) et du compost en surface. Ces buttes occupent 1,30 m de largeur à la base. Elles ont été réalisées il y a 5 ou 6 ans et sont exploitées de la même façon que les planches à plat (mulch systématique, parfois un travail superficiel de nettoyage). Elles donnent satisfaction, sans qu'il soit question pour autant de remettre en cause le choix dominant des planches à plat. Ces buttes sont sur une zone inondable, leur fonction est surtout de mettre hors d'eau les cultures.
Depuis quatre ans, une partie des matières organiques générées sur la ferme (herbe fauchée dans le verger, résidus de désherbage et de cuisine, etc.) sont déposées en andains sur une base d'1,30 m de largeur. Ces andains s'affaissent lentement par l'effet de la décomposition. Ils sont renfloués régulièrement, et au bout de deux à trois ans sont occupés par des solanacées ou cucurbitacées, plantées ou semées directement dans la biomasse en décomposition.
« Le passage au non travail du sol n'a pas modifié la pression des maladies ni des ravageurs. »
En cas de présence d'adventices nombreuses et difficiles à arracher, le travail se fait au croc et à la houe. Ces outils permettent de régler tous les problèmes, mais au prix d'un travail parfois pénible et toujours long, c'est pourquoi Pierre et Nicole s'efforcent de prévenir ces situations critiques.
Plutôt que de « non travail du sol », il faudrait plutôt parler de « non travail profond du sol », étant donné que les opérations de travail superficiel sont encore assez fréquentes.
Intérêts du point de vue de l'agriculteur
Economiques |
Agronomiques |
Environnementaux |
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Difficultés :
- Dépendance aux matières organiques extérieures. Les maraîchers souhaitent aller vers plus d'autonomie et pouvoir gérer la fertilité de leurs sols grâce à la biomasse produite sur l'exploitation, voire sur la parcelle maraîchère elle-même. Ils ne sont pas dupes et savent que la concurrence pour l'accès à la biomasse ne peut que s'aiguiser à l'avenir.
Pierre Besse : le maraîchage sous mulch
La maîtrise des adventices, une préoccupation majeure pour les maraîchers. Pierre Besse nous explique la combinaison de techniques qu'il utilise et nous fait découvrir l'intérêt du maraîchage sous mulch, sa mise en œuvre pratique ainsi que les points clés de réussite.