Des plantes peu compétitives
Les plantes messicoles partagent la même niche écologique que les cultures de céréales à paille avec lesquelles elles poussent et peuvent être considérées comme un groupe d'espèces spécialistes. Ces espèces sont donc adaptées aux perturbations du sol liées aux pratiques culturales. Elles réalisent leur cycle biologique entre le semis et la moisson de la céréale.
La majorité des plantes messicoles françaises (101 espèces) dépendent des insectes pour leur pollinisation (abeilles, bourdons, mouches, papillons ou carabes). 82 % des plantes étudiées sont entomophiles et seulement 11 % sont anémophiles. Elles sont souvent autogames.
La majorité des messicoles sont des espèces annuelles appartenant au type biologique des thérophytes dont le mode de persistance exclusif est la graine. On peut les assimiler au type biologique SR de Grime. De courte durée de vie, les messicoles allouent une grande partie de leurs ressources à la reproduction : elles passent 50 % à 67 % de leur de vie sous forme de graine, d'où leur vulnérabilité face aux pratiques, et à la levée d'autres adventices plus rudérales et ubiquistes. Elles doivent produire des graines en grande quantité et avant la moisson. Elles présentent ainsi une stratégie de reproduction de type "r " qui caractérise les espèces s'imposant dans les écosystèmes par leur grande vitesse de multiplication, une productivité élevée, une durée de vie courte, et une reproduction précoce.
La plupart (70 %) des espèces menacées sont diploïdes, et appartiennent à des taxons anciens dotés d'une faible variabilité génétique, contrairement à d'autres adventices très persistantes comme les genres Amaranthus ou Chenopodium qui par ailleurs peuvent présenter des résistances aux herbicides. Ce sont donc des plantes fragiles au niveau de leur succès reproducteur (nombre de graines produites), et pour leur dissémination qui reste très dépendante de l'homme lors de la moisson, dissémination sur pied par la machine, et du semis (cas des semences fermières, ou échanges de graines peu triées = speirochorie) (Gerbaud, 2002 ; Roche, 2002, Affre, 2003). En effet, la myrméchocorie, et l'endo- et exozoochorie par les moutons durant la vaine pâture sont globalement négligeables sauf pour Caucalis platycarpos, Turgenia latifolia, Galium tricornutum, Legousia hybrida, Sideritis montana (Dutoit, 2003 ; Affre, 2003).
Seules l'Anémochorie et la Barochorie restent les moyens naturels principaux de leur dissémination, mais restent très locales (Affre, 2003). Leur maintien et leur dynamique sont modelés au champ de façon positive soit négative par les facteurs présentés ci-dessous. La dissémination par l'épandage du fumier n'a pas été étudiée à ce jour.
La plupart des espèces sont aussi oligotrophes et supportent donc difficilement les fortes charges en azote.
Concernant le type de sol, elles sont majoritairement inféodées aux sols calcaires. Seules 7 espèces sont inféodées aux sols silicicoles (Apera spica-venti, Aphanes arvensis, Scleranthus annuus, Spergula arvensis, Spergularia segetalis, Vicia articulata).
Ces caractéristiques propres aux messicoles en font des plantes extrêmement sensibles à l'intensification des pratiques agricoles (usage d'insecticides, d'herbicides, fertilisation azotée). Celles-ci restent aussi totalement dépendantes des céréales à paille d'hiver de par leur cycle de germination (généralement à l'automne) et de vie (plante annuelle).
Les principales caractéristiques des plantes messicoles strictes sont résumées dans le tableau suivant (Tableau 1). Ces caractéristiques montrent que, contrairement à de nombreuses adventices, les messicoles peuvent difficilement résister à l'intensification des pratiques agricoles du fait de leur faible capacité d'adaptation. Certaines de ces adventices ont même développé des résistances aux herbicides et posent des problèmes importants de désherbage en l'absence de rotations appropriées. Parmi les messicoles, seules Papaver rhoeas et Viola arvensis ont développé de telles résistances.
Messicoles strictes | Adventices |
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Spécialistes | Généralistes (ségétales communes, espèces envahissantes). |
Aires de répartition généralement restreinte. | Aires de répartition large. |
Essentiellement dans les céréales d'hiver (commensale des céréales). Difficulté de coloniser d'autres milieux (milieux non cultivés). | Aussi dans les céréales de printemps et d'été, et autres cultures. |
Essentiellement annuelle, thérophyte | Aussi vivace |
Diploïde (à 75 %). Peu polymorphes. Ce qui veut dire espèces stables aux exigences écologiques strictes. Très vulnérables aux modifications de leur environnement. | Polyploïde (50 % à 75 %). Ce qui veut dire espèces plus dynamiques, voir envahissantes polymorphes, plus vigoureuses, plus tolérantes, aux niches écologiques plus larges. |
Rythme biologique stricte avec faible production de graines. Forte proportion de semences à faible durée de vie (inf à 3 ans). Pollinisation majoritairement entomophile. Supportent la concurrence et les nouvelles pratiques agricoles. | Forte plasticité écologique. Grande quantité de graines produites. Proportion importante de semences longélives (sup à 3 ans et rarement inférieure à 1 an). |
Germination majoritairement automnale. | Germination printanière aussi. |
Oligotrophe. | En partie nitrophile. |
Faible résistance aux herbicides (sauf Viola arvensis, Alopecurus myosuroïdes, Avena fatua, Lolium …). | Certaine résistance aux herbicides. |