Du concept à la technique
Différentes configurations
Cette pratique peut être mise en place soit à l'échelle d'une même exploitation soit à l'échelle d'un territoire.
- Ainsi, au sein d'une exploitation, l'arboriculteur souhaite introduire des animaux, dans un souci de cohérence globale de son système, pour maîtriser l'enherbement et/ou diversifier ses productions.
- A l'échelle d'un territoire, il s'agit d'envisager les synergies entre au moins deux exploitations l'une en polyculture-élevage ou élevage et l'autre en culture(s) pérenne(s). Ce système se base sur un système d'entente verbale et d'entraide.
Concernant les animaux susceptibles d'être introduits dans les vergers, on recense :
- les ovins,
- les bovins,
- les monogastriques (poules, oies, canards et cochons),
- les équins (chevaux, ânes).
Chacun présentant des intérêts et des inconvénients.
Principaux élevages introduits dans les vergers ou vignobles : avantages et inconvénients. *Données issues du guide technique FREDON Martinique & CIRAD, 2013. “Associer production fruitière et élevage de volailles, une méthode innovante pour contrôler l'enherbement”. **Nécessité d'un vide sanitaire.
Les ovins / Les bovins
Espèces | Moutons | Vaches |
---|---|---|
Rusticité | Oui. Les races de petite taille sont à privilégier (Shropshire). | Oui, nécessité de prairies ou jachères à proximité. |
Configuration envisageable (temps de présence) |
Entente verbale berger/agriculteur (après la récolte et/ou avant le débourrement). Agriculteur-éleveur (à l'année). |
Agriculteur-éleveur (pendant repos végétatif). |
Charge animale requise | Variable | 2/ha |
Efficacité de désherbage |
Pas de données chiffrées mais réduction du nombre de gyrobroyage | Pas de données mais réduction du nombre de gyrobroyage. |
Sélectivité | Pas de données chiffrées | |
Consommation des fruits au sol | Non mais par piétinement, accélération de leur décomposition. | Non |
Temps de travail |
Mise en place des parcs mobiles (clôture électrifiée, abreuvoirs…) Selon la configuration de l'exploitation, possibilité d'avoir des clôtures fixes. |
Mise en place des parcs (clôture électrifiée, abreuvoirs…). |
Effet sur les ravageurs | Pas de données mais constat d'une moindre incidence de la mouche de l'olive (Bactrocera oleae) sur les parcelles prospectées. | Pas de données |
Valorisation en Vente Directe | Oui, viande mais des contraintes réglementaires et économiques existent (fermeture de petits abattoirs, normes sanitaires à respecter, frais d'abattage, de transport frigorifique…). | Non |
Les monogastriques
Espèces |
Poulets Coqs Pondeuses |
Canards | Oies | Cochons |
---|---|---|---|---|
Rusticité | Non, nécessité d'au moins un bâtiment (par rapport à leurs prédateurs naturels = renard, fouine, chien errant*). Il peut être fixe ou mobile | Oui, nécessité d'au moins un bâtiment (par rapport à leurs prédateurs naturels = renard, fouine, chien errant*). *). Il peut être fixe ou mobile | Oui | |
Configuration envisageable (temps de présence) | Agriculteur-éleveur (à l'année**) | |||
Charge animale requise | 500/ha (adultes) à 1500/ha (jeunes) * | 400 à 500/ha | 50 à 100/ha* | Au moins 1 sur l'exploitation |
Efficacité de désherbage |
60 g/j* | 200 g/j* | 1 000 g/j* | Pas de données mais réduction du nombre de gyrobroyage. |
Sélectivité | Faible | Moyenne | Forte | Pas de données |
Consommation des fruits au sol | Goyaves : oui* |
Goyaves : oui* Pommes : oui |
Pommes : oui | |
Temps de travail | 10 min* à 1/2 h / j (si collecte œufs) + 1,5 j/an de curage des bâtiments (vide-sanitaire) | 10 min* |
Mise en place des parcs mobiles (clôture électrifiée, abreuvoirs…). Selon la configuration de l'exploitation, possibilité d'avoir des clôtures fixes. |
|
Effet sur les ravageurs | Pas de données chiffrées mais impression de moins de problème de carpocapse sur les parcelles prospectées | Pas de données chiffrées. | Pas de données chiffrées mais impression de moins de problème de carpocapse et de tavelure sur les parcelles prospectées | |
Valorisation en Vente Directe |
Oui, forte demande*. Œufs = produit d'appel Vente de poulets, coqs, poules vivants ou en conserve. |
Oui, faible demande | Non |
Les équins
Espèces | Anes | Chevaux |
---|---|---|
Rusticité | Oui, compatible avec des terrains escarpés non mécanisables. | Oui, nécessité de prairies ou jachères à proximité. |
Configuration envisageable (temps de présence) |
Entente verbale berger/agriculteur (après la récolte et/ou avant le débourrement). Agriculteur-éleveur (à l'année). |
Agriculteur-éleveur (pendant repos végétatif). |
Charge animale requise | Au moins 1 sur l'exploitation. | |
Efficacité de désherbage |
Pas de données mais réduction du nombre de gyrobroyage. | |
Sélectivité | Pas de données | |
Consommation des fruits au sol | Pommes : oui | |
Temps de travail | Mise en place des parcs (clôture électrifiée, abreuvoirs…). | |
Effet sur les ravageurs | Pas de données | |
Valorisation en Vente Directe | Non |
Mise en œuvre technique : les points clés
Choix des animaux et des parcelles
En ce qui concerne les exploitations « mixtes », le choix des animaux se détermine en fonction des objectifs que se fixe l'agriculteur :
- rusticité (en extérieur une majorité de l'année, avec peu ou pas de complément alimentaire…),
- mode d'alimentation,
- capacité à entretenir le couvert végétal,
- fumure de la parcelle par les déjections animales, qui contribuent à l'activité biologique du sol (micro, méso et macrofaune),
- diversification des productions,
- capacité de garde.
Un autre critère non négligeable concerne la fibre de l'éleveur que portent ces agriculteurs ainsi que la notion d'affinité avec une race en particulier pour la conduire voire plusieurs dans le cas où différents animaux parcourent les vergers à différentes finalités.
Trouver l'équilibre entre les production animales et végétales
Pour les agriculteurs conduisant différents ateliers de production animale et végétale, ils soulignent la difficulté à trouver le bon équilibre entre les ateliers et la technicité que cela nécessite pour conduire à bien ces ateliers.
L'amélioration de la biodiversité fonctionnelle sur les zones pâturées peut être constatée du fait d'une réactivation de l'activité biologique du sol et des réseaux trophiques qui en dépendent. Cependant, selon les animaux introduits, leur chargement sur les parcelles et l'appétence des surfaces enherbées disponibles, l'apparition de zones de refus et une sélection de la flore peuvent s'opérer. Dans certains cas, une réduction de la diversité floristique peut être observée.
Déterminer les périodes de pâturage
La période à laquelle le troupeau va pâturer ainsi que la fréquence des passages sont importants. Le pâturage est calé sur la pousse de l'herbe dans l'inter-rang et sur le rang.
L'arbre ou la vigne va avoir un effet régulateur sur la pousse de l'herbe, il la freine au printemps (période de croissance végétative), en revanche il la favorise en été du fait de l'arrêt de la croissance végétative au profit de la croissance des fruits à cette période.
Ainsi, dans un système d'entraide, les brebis effectuent un premier passage après la récolte (fin octobre), et un autre passage au début du printemps (tout début mars), avant le débourrement des bourgeons. Il est possible de faire intervenir les vaches et les chevaux également à cette période. Ces périodes correspondent au repos hivernal de l'arbre et de la vigne durant laquelle aucun traitement phytosanitaire n'est appliqué et aucune opération culturale n'est réalisée hormis la taille (de janvier à février) et le broyage des bois de taille (février). L'intervention du troupeau a lieu hors de ces périodes pour éviter que les animaux ne se blessent.
Le pâturage intervient en complément de l'entretien mécanique, soit directement après la récolte afin d'éviter que les animaux ne consomment les feuilles et les fruits, ce qui pourrait pénaliser directement le rendement de ces productions et/ou avant avant le débourrement.
Le système d'entente verbale entre un exploitant et un éleveur
Des précautions sont prises en amont par l'exploitant qui met ses parcelles à disposition. Si ses parcelles sont palissées et irriguées au goutte-à-goutte ou par micro-aspersion, l'exploitant anticipe l'arrivée des animaux et remonte le système d'irrigation (micro-aspersion), pour éviter que les animaux ne se blessent ni ne détériorent le matériel.
Pour le berger, cela implique que le troupeau se déplace hors de l'exploitation, il doit donc assurer la sécurité liée à ce déplacement (demande d'autorisation auprès des autorités locales si il y a une traversée de route).
Lorsque les parcelles ne sont pas clôturées, un gardiennage du troupeau est indispensable à la fois pour contenir le troupeau et gérer son avancement dans les vergers et surtout éviter que les animaux ne s'attaquent aux jeunes plants.
Ce système permet d'envisager un chargement important sur une période relativement courte.
Des problèmes techniques encore sans réponse
Aucune donnée chiffrée et quantifiée n'est actuellement disponible et la mise en œuvre de cette pratique repose davantage sur la description qualitative de situations existantes. L'acquisition de références et l'accompagnement des agriculteurs dans leur démarche constituent des étapes indispensables pour entrevoir un développement de cette pratique.
Pour l'instant, les échecs qui ont été constatés avec cette pratique sont souvent corrélés à la gestion, à la conduite et au comportement des animaux.
Ainsi, il arrive qu'un animal en particulier prenne de mauvaises habitudes (du fait d'une carence) qui peut se généraliser au lot introduit (exemple brebis qui s'appuient sur les arbres pour aller manger les feuilles et/ou les fruits). Dans ce cas précis, il se peut qu'il faille envisager de renouveler le cheptel, avec de jeunes animaux pour les habituer à pâturer dans ces parcelles le plus jeune possible.
Un autre aspect concerne le bon équilibre entre le chargement nécessaire et suffisant pour avoir des résultats significatifs du pâturage sur le rang et le maintien d'un système durable (diversité floristique du couvert, autonomie alimentaire de l'élevage …).
Cette pratique ouvre de nouveaux champs de recherche portant justement sur l'étude du comportement des animaux dans ces systèmes mais également sur l'appréhension d'une meilleure connaissance des différentes configurations possibles et des services rendus par chacune en essayant d'avoir une évaluation multicritères de leurs avantages et inconvénients.