Vulnérabilité des exploitations au changement climatique

Indicateurs Agroclimatiques

La démarche

Dans cette approche, nous regarderons les différents aléas qui touchent la ferme et ses ressources au regard du climat local sur la période 1979 - 2019. Les évolutions climatiques permettront de définir les indicateurs agroclimatiques qui ont ou auront un impact significatif sur le système de production. Mis en regard au travers des pratiques d'adaptation.

Questions pour l'agriculteur

Quels sont les aléas climatiques rencontrés ?

Description du climat local

Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2021 (Source : Agri4Cast, JRC)

Les températures annuelles :

La hausse tendancielle des températures annuelles se confirme localement sur la période d'analyse, à l'image de la situation plus générale en France. Cette hausse concerne tous les paramètres (températures moyennes, minimales et maximales) et accentue ici les dégâts de la sécheresse. On observe également une hausse des jours chauds (> 25°C), +31% passant de 65 jours en 1979 à 85 jours en 2021, et des jours très chauds (> 30°C), +60% passant de 17,5 en 1979 j à 28 j en 2021, pouvant impacter le remplissage des grains de blé et céréales mais non mentionnés à ce stade par les agriculteurs.

 

Le gel :  

Pour le gel, a contrario, on observe une diminution tendancielle, le nombre de jours de gel passant d’un peu moins de 40 jours/an en 1979 à environ 25 jours en 2021, soit une baisse d’un peu moins de la moitié en 42 ans.

Les nombres de jours de grands froids (< -5°C) par an, diminuent eux mais a un rythme moins soutenu.

 

Le gel tardif :

Il en va de même pour nombre de jours de gel tardif qui présente une baisse tendancielle entre 1979 et 2021, en diminuant d’un peu plus de la moitié (un peu moins de 5 jours en 1979 et un peu plus de 2 jours en 2021). A noter qu’en parallèle, que les records de températures minimales entre avril et mai, ont en revanche tendance à augmenter de presque +2°C en avril et de +1°C en mai entre 1979 et 2021.

 

Précipitations et déficit hydrique :

Sur l’horizon 1979-2021, le volume de précipitations et de déficit hydrique semble quasi équivalent sur la période avec en revanche des fluctuations inter-annuelles assez marquées.

 

L'excès d'eau :

En revanche, une constance pour le nombre de jours de fortes précipitations à la période printanière est observée entre 1979 et 2021.

 

Quelles sont les ressources touchées sur la ferme ?

Voir le tableau ci-dessus

 
Quelles évolutions climatiques à venir localement ?

L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques locales et illustrent les principaux enjeux climatiques pour un système grandes cultures.

Les températures :

D’après les projections climatiques locales du Carla-Bayle, dans le scenario le plus pessimiste, la médiane du stress thermique durant la période épiaison-floraison, (pendant lesquelles les céréales sont particulièrement sensibles au phénomène d'échaudage thermique, accident de croissance des grains), augmente significativement passant de 21 jours pour le passé récent (1985-2020) à 27 jours pour le futur proche (2021-2050), ce qui constitue un risque sérieux pour les céréales à cette période, pouvant causer des pertes de rendement sur le blé de l'exploitation par échaudage (avec une médiane qui évolue à 17 jours durant lesquels la température est supérieure à 25°C entre le 1er mai et le 30 juin, dans un futur proche, vs. 12,5 jours dans le passé récent.

Concernant le redémarrage de la pousse de l’herbe, il serait plus précoce de 4 jours dans un futur proche (31 janvier).

 

Les précipitations :

Les précipitations printanières s’annoncent légèrement inférieures dans un futur proche (-11 mm en médiane entre début mars et fin juin), renforçant ainsi le risque de stress thermique entre épiaison-floraison évoqué précédemment tout en maintenant dans un niveau relativement équivalent le risque de verse pour les céréales à cette période.

En ce qui concerne les prairies, comme l’indiquent les graphiques ci-dessous, le déficit hydrique s’aggrave :

  • d’un facteur x1,6 dans un futur proche (-52 mm en médiane) en période printanière par rapport au passé récent
  • et proche d’un facteur x1,2 (-212 mm) en période estivale.

 

L'excès d'eau :

Les risques d’excès d’eau post-semis de céréales d’hiver, restent à peu près équivalent dans un futur proche.

En revanche, en ce qui concerne les risques de gel, il semble que celui-ci soit vraisemblablement équivalent dans un futur proche.

Concernant les précipitations annuelles et intenses, peu de changement à prévoir entre passé récent et futur proche.

 

Quelles sont les pistes d'adaptation au sein de la ferme ?

Les pistes d’adaptation à développer sur la ferme sont autour de la poursuite des pratiques actuelles de généralisation de la couverture des sols en hiver, voire sur l’année entière, associée au moindre travail du sol, ainsi qu’à l’apport de MO par les déjections animales des brebis qui viennent pâturer à 2 temps différents durant la campagne (automne et sortie hiver) qui ont pour objectif d’augmenter la fonctionnalité biologique des sols, en améliorer la structure et le taux de MO, et également l’infiltration de l’eau, notamment lors de fors épisodes pluvieux. De plus, comme le GAEC de Mestrepey est en zone de coteaux, cela limite également l’érosion hydrique des sols et donc les préserve. La forte présence d’infrastructures agroécologiques (haies, bois, landes, bandes enherbées…) distribuées sur l’ensemble de l’exploitation et présentant des corridors écologiques pour connecter différents habitats entre eux, permet aussi d’attirer de nombreuses espèces animales et végétales mais aussi de créer des microclimats et ainsi de réduire notamment les excès de températures sur les cultures et les prairies.

Par ailleurs, l’utilisation de plus de 15 variétés anciennes, permet également aux agriculteurs de se prémunir d’un aléa sur une variété unique et de s’assurer qu’un minimum de variétés trouveront les conditions abiotiques nécessaires pour se développer ; et a minima permettra de maintenir une stabilité interannuelle des rendements. Cela confère une certaine résilience du système aux agriculteurs.

 

Avez-vous mis en places des pratiques d'adaptation ?

Avec des haies plantées partout (environ 15 km en tout), Jeanne et Simon envisagent une atténuation des impacts sur leurs productions, comme André et Françoise précédemment, à l’origine de ces plantations entièrement financées dans le cadre des Contrats Territoriaux d’Exploitation (CTE, dans les années 2000).

Toutes les parcelles ont été entourées, avec l’objectif de ralentir les écoulements d’eau (ruissellements) dans les parcelles situées sur les coteaux et ainsi favoriser l’infiltration de l’eau dans les parcelles afin qu’elle bénéficie aux cultures en place.

Jeanne et Simon, ont également misé depuis leur installation sur une couverture des sols maximale en période hivernale (cultures d’hiver) voire sur l’année (prairies temporaires), et arrêt des cultures de printemps.

La taille moyenne des parcelles est de 7,9 hectares, favorisant un certain effet bordure et donc la pénétration des auxiliaires de culture presque jusqu’au cœur des parcelles. L’idéal serait cependant de viser une taille moyenne de parcelle de 6 ha. Les plus grosses mesurent entre 10 à 20 ha (Jean Bounet) mais ne sont pas en grand nombre sur l’exploitation.

 

Pour aller plus loin :

Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt : https://agriadapt.eu/objetives/?lang=fr. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.

A l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.

Plateforme AWA : https://awa.agriadapt.eu/fr/

Portail CANARI : https://canari-agri.fr/

Vidéos

Contact

Jeanne et Simon Barrès

GAEC de Mestrepey
Lieu-dit Mestrepey
09130 CARLA-BAYLE
Site : https://www.facebook.com/Le-Fournil-de-Mestrepey-109416804248231/about/
Email : gaec.de.mestrepey@gmail.com