Quels sont les aléas climatiques rencontrés ?

Description du climat local

Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2020 (Source : Agri4Cast, JRC)

• Les températures annuelles :

La hausse tendancielle des températures annuelles se confirme localement sur la période d'analyse, à l'image de la situation plus générale en France. Cette hausse concerne tous les paramètres (températures moyennes, minimales et maximales) et provoque ici un mauvais remplissage des grains (voir plus bas). On observe également une hausse des jours chauds (> 25°C) et des jours très chauds (> 30°C).

• La sécheresse :

Nous avons ici les précipitations sur la période déclarée de sécheresse par Marc Lefebvre, de 1979 à 2020. On remarque une légère augmentation sur les 40 dernières années. En regardant mois par mois, il n'y a pas de changements significatifs de mars à mai. On remarque cependant une forte variabilité entre les années. Les années déclarées en sécheresse par Marc Lefebvre (2019, 2020) sont effectivement plus basses sur le graphique que 2018. On peut supposer que la répartition de l'eau est irrégulière, avec plusieurs semaines en sécheresse, entrecoupées d'épisodes de fortes pluies.

• L'excès d'eau :

Voici le cumul des précipitations sur la période déclarée comme excédante en eau par Marc Lefebvre. On remarque une franche augmentation sur les 40 dernières années. De plus, les deux graphiques ci-dessous présentent le nombre de fortes pluies (> 25 mm/jour), sur l'année et sur la période octobre-janvier, témoigne aussi d'une augmentation tendancielle. Ainsi, l'aléa d'excès d'eau se remarque bien sur ces graphiques, et les années relevées par l'agriculteur ressortent bien (2019 et 2020).

Quelles sont les ressources touchées sur la ferme ?

• Pour l'aléa de sécheresse, ce sont les cultures de printemps qui sont les plus touchées : l'orge, le lin fibre, la pomme de terre et le maïs. Ces cultures peuvent manquer de développement, ou même s'assécher par stress hydrique. Le rendement est donc impacté.
• Fortes températures : Les céréales de l'exploitations sont touchées par les fortes températures estivales, qui provoquent un mauvais remplissage des grains avant la récolte.
• Excès d'eau : L'excès d'eau est un problème pour toutes les cultures d'hiver. En effet, des parcelles peuvent être noyées, des pieds détruits. Les pertes de rendements sont de 20 à 30%. 

Quelles évolutions climatiques à venir localement ?

L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques locales et illustrent les principaux enjeux climatiques pour un système grandes cultures.

Quatre indicateurs sont présentés en lien avec le système de Marc Lefebvre :

• Les températures et précipitations annuelles :

Voici les projections à l'horizon 2050 pour les températures moyennes et les précipitations annuelles. On remarque une augmentation des deux facteurs. Ainsi, les aléas de chaleur et d'excès d'eau semblent globalement avancer dans les 30 années à venir.

• L'indice de stress thermique du 15 mai au 15 juillet :

Cet indice est un dénombrement des jours avec des températures maximales strictement supérieures à 25°C de mi-mai à mi-juillet. Cette période englobe l'épiaison et la floraison des cultures céréalières, pendant lesquelles elles sont particulièrement sensibles au phénomène d'échaudage thermique, accident de croissance des grains. On remarque donc une nette augmentation de ce nombre de jours à l'horizon 2050, ce qui pourrait causer des pertes de rendement supplémentaires sur le blé et l'orge de l'exploitation par échaudage, et mauvais remplissage des grains.

• La sécheresse : 10 jours consécutifs sans pluie

Cet indicateur le nombre de séquences de 10 jours consécutifs sans pluie, du 1^er mai au 31 août. Ces séquences peuvent causer des sécheresses nuisant aux cultures d'hiver et de printemps : floraison, pollinisation, ou encore le remplissage des grains. De plus, de juillet à août, le maïs a de forts besoins en eau : 6-7 mm/jours pendant la floraison. Ainsi, l'aléa de sécheresse semble en légère augmentation dans les 30 années à venir. Comme on l'a vu sur le cumul de précipitations annuel, il y aura donc plus d'eau sur l'année, mais une répartition irrégulière, comme en témoigne ce graphique : des périodes de sécheresse entrecoupées d'épisodes de fortes pluies.

• L'excès d'eau après semis :

Cet indicateur présente le cumul des précipitations durant le mois de Novembre, qui évalue donc le risque d'excès d'eau après le semis de cultures d'hiver, comme le blé. Une quantité d'eau stagnante entraîne un déficit d'oxygène pour la plante : or les premières étapes du cycle de développement (germination – levée) sont très sensibles à l'hypoxie. Plus ce phénomène d'ennoiement continu perdure, plus les impacts seront importants, du retard de développement jusqu'à la destruction des pieds au-delà de 10 jours consécutifs, notamment pour le blé. C'est donc un aléa critique pour le blé et l'orge de l'exploitation. À l'horizon 2050 et d'après les projections, ces précipitations deviennent plus irrégulières et variables, avec une tendance à l'augmentation. Ainsi, le risque d'excès d'eau sera de plus en plus problématique d'après ces projections.

Quelles sont les pistes d'adaptation au sein de l'EARL Lefebvre ?

• Contre la sècheresse et les fortes températures, l'agroforesterie est pratiquée sur l'exploitation, qui permet d'apporter de l'ombre aux cultures par effet bordure (limité pour l'instant car les arbres sont jeunes), et de mobiliser l'eau en profondeur. La couverture végétale permanente limite l'évaporation et garde l'humidité dans le sol. Cependant, cela peut-être un inconvénient : les dates de semis peuvent être ratées si les couverts ne sont pas détruits au bon moment, ou s'il y a des repousses. Rater la date optimale de semis peut ensuite rendre la culture plus vulnérable aux aléas climatiques.
• Contre l'excès d'eau, Marc Lefebvre a souscrit à une assurance récolte. Il réalise des semis plus précoces des cultures d'hiver, pour avoir un meilleur démarrage de la plante avant les fortes pluies. Il arrive également qu'il ressème une parcelle qui a été trop endommagée.

De plus, l'exploitation a une bonne diversité de productions, ce qui permet de répartir le risque et d'assurer un revenu.

Pour aller plus loin :

Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt : https://agriadapt.eu/objetives/?lang=fr. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.

A l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.

• Plateforme AWA :

 https://awa.agriadapt.eu/fr/