Vulnérabilité des exploitations au changement climatique

LA DÉMARCHE

Il s'agit de caractériser la vulnérabilité de la ferme aux aléas climatiques et ses leviers d'adaptation.

Dans cette approche, nous regarderons tout d'abord les différents aléas qui impactent aujourd'hui la ferme au regard des observations climatiques locales sur la période 1979 - 2022. Puis, les évolutions climatiques à venir d'ici 2050 seront illustrées au travers d'indicateurs agro-climatiques spécifiques du système de production de l'exploitation étudiée. Enfin, les pratiques d'adaptation déjà mise en œuvre sur la ferme ou bien en cours de réflexion seront abordées.

QUELS SONT LES ALÉAS CLIMATIQUES RENCONTRÉS ?

 

DESCRIPTION DU CLIMAT LOCAL

Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2022 (Source : Agri4Cast, JRC).

Les températures annuelles semblent être en hausse tendancielle, à l'image de la situation générale en France, même si cette hausse est relativement peu marquée. Cependant, la moyenne de cette série climatique est de 15,50°C ce qui est très élevé en comparaison avec la moyenne française. Cette hausse tendancielle concerne principalement les températures moyennes et minimales. Les conséquences concernent donc le raccourcissement des durées des cycles de développement des cultures, avec des dates de maturités plus précoces (somme de degrés jours plus importante).

Le nombre de jours chauds (Tmax > 25°C) et très chauds (Tmax > 30°C) sont en hausse tendancielle et semblent témoigner d'une dynamique similaire. Les années les plus récentes sont caractérisées par un indicateur de nombre de journées très chaudes (Tmax > 30°C) relativement important (plus 36 jours par an, supérieur à la moyenne sur la période).

 

Le nombre tendanciel de jours de gel par an est en régression, avec depuis 2014 un faible nombre de jours de gel cumulés chaque année (moins de 15 jours/an, valeurs inférieures à la moyenne sur la période).

Toutefois, l'intervention de températures négatives au printemps (mois de mars et avril) subsiste ponctuellement, sur une végétation qui a tendance à être davantage développée par la hausse tendancielle des températures.

 

Le déficit hydrique est calculé par la différence entre pluviométrie et évapotranspiration, il est cumulé sur le graphique ci-dessus pour la période mai-juin. Les dernières années sont caractérisées par des valeurs systématiquement élevées de déficit hydriques, souvent supérieures à la moyenne.

 

Voici le cumul des précipitations sur la période septembre – octobre, déclarée comme problématique par l'agriculteur à cause d'excès en eau. La tendance sur les 40 années est à l'augmentation, avec une forte variabilité interannuelle sur les 10 dernières années environ.

QUELLES SONT LES RESSOURCES TOUCHÉES SUR LA FERME ?

Pour l'augmentation de la durée et de l'intensité des sécheresses et fortes températures
  • Type de ressources impactées : les cultures, les vignes
  • Durée des impacts : Il y a toujours eu une période un peu sèche en été. Mais la durée de ces épisodes sont de plus en plus longs (températures estivales de Avril à Septembre).
  • Impacts directs :

            - Mortalité sur les cultures ;
            - Salinisation : remontée de sel vers la surface liée à l'évaporation de l'eau douce et à la diminution des précipitations ;
            - Baisse du niveau du Rhône en période sèche, pouvant descendre au niveau de la mer. Ce phénomène implique une remontée de l'eau salée marine dans le fleuve et rend le pompage d'eau douce depuis le fleuve pour l'irrigation compliqué. Or l'irrigation en Camargue est indispensable pour contrer la salinisation.

 

  • Impacts indirects : Salinisation entraîne la mort des cultures (apparition de cercles de mortalité dans les luzernes, les cultures, les vignes...).
Pour la douceur des hivers et baisse du nombre de jours de gel :

Type de ressources impactées : les cultures

  • Impacts directs : Limite la mortalité des ravageurs,
  • Impacts indirects : Augmentation des attaques de ravageurs et apparition de nouveaux ravageurs (escargots, punaises…).
Pour les fortes pluies
  • Type de ressources : les cultures
  • Durée des impacts :  1 à 2 mois
  • Impacts directs : Excès d'eau, difficulté pour vendanger

QUELLES ÉVOLUTIONS CLIMATIQUES À VENIR LOCALEMENT ?

L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques et illustrent les principaux enjeux climatiques à l'horizon 2050 pour lesquels des adaptations seront nécessaires (source : portail CANARI-France).

 

4 indicateurs sont présentés pour la ferme :

 

Le nombre de journées échaudantes (température maximale dépassant 25°C), déjà en hausse ces dernières années, semble se renforcer sensiblement dans les 30 prochaines années, avec très régulièrement des valeurs élevées à très élevées. Les enjeux d'adaptation vont donc se renforcer, notamment pour les céréales (échaudage de fin de cycle, précocité des moissons, etc.).

La situation est identique sur la période estivale avec une augmentation très significative du nombre de journées dont la température maximale dépasse 32°C. Ponctuellement, des records de jours très chauds peuvent s'établir à près de 19 jours sur la période estivale. Cela traduit un durcissement des conditions de cultures, avec un stress thermique significatif pour le tournesol sur la ferme, et des difficultés lors de la coïncidence avec la phase de pollinisation.

 

 

L'indice héliothermique de Huglin (IH) est un indice de chaleur bioclimatique permettant une classification des climats viticoles, et permet d'avoir une idée du potentiel en sucre de différents cépages dans un contexte donné. Localement, l'évolution tendancielle des températures ferait évoluer l'IH de la classe actuelle « Tempéré chaud » vers la classe supérieure « Chaud », ce qui induit une évolution des cépages cultivés.]
[Températures et indices bioclimatiques dans le vignoble du Val de Loire dans un contexte de changement climatique]
 


                                                                                                                                                     

Le nombre de jours de gel annuel semble continue à diminuer, limitant le risque de gel tardif pour les vignes.

 

AVEZ-VOUS MIS EN PLACE DES PRATIQUES D'ADAPTATION ?

Le phénomène de salinisation existe depuis la mise en culture de la Camargue, à l'époque Napoléonienne. A cette époque, le Rhône a été endigué et a permis de submerger les parcelles avec de l'eau douce et de dissoudre le sel. Le riz est la seule culture pouvant être implantée dans ces conditions.  

 

 Lutte contre les sécheresses et la salinisation :

  • Augmentation de l'irrigation et mise en place de submersion estivale : ennoiement des parcelles avec un fort taux de salinité
  • Submersion des cultures pérennes (vignes) durant l'hiver, pour faire baisser le taux de salinité (pose des problèmes d'asphyxie des sols et diminution de la vie microbienne)
  • Adaptation de portes greffes (SO4) supportant bien les sécheresses et les fortes précipitations
  • Irrigation des prairies permanentes certaines années
  • Diversification de l'assolement
  • Diversification des cépages (variétés qui résistent un peu mieux à la sécheresse) et des variétés en cultures (luzerne : variété italienne nécessitant peu d'eau ; orge et blé : nouvelles variétés nécessitant moins d'eau).
  • Travail superficiel du sol pour conserver la fraicheur en profondeur
  • Implantation de nouvelles cultures (grenadier) bien adapté aux températures élevées
Pour aller plus loin :

CANARI-France est un portail web en accès libre destiné aux acteurs agricoles souhaitant calculer directement en ligne, simplement et rapidement, des indicateurs agro-climatiques locaux à partir de projections climatiques.

 

Portail CANARI-France

Carte et point de grille

Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.

À l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.

Plateforme AWA

Mesures d'adaptation pour les vergers et vignes

Mesures d'adaptation pour les grandes cultures

Vidéos

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Contact

Pierre et Julien CARTIER

Domaine de Beaujeu
12073, Rte de Salin-de-Giraud
13200 ARLES
Site : https://domainedebeaujeu.fr
Email : contact@domainedebeaujeu.fr