Vulnérabilité des exploitations au changement climatique

Quels sont les aléas climatiques rencontrés ?

Description du climat local

Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2020 (Source : Agri4Cast, JRC)

  • Les températures annuelles :

La hausse tendancielle des températures annuelles se confirme localement sur la période d'analyse, à l'image de la situation plus générale en France. Cette hausse concerne tous les paramètres (températures moyennes, minimales et maximales) et provoque ici une mauvaise pollinisation du maïs (voir plus bas). On observe également une hausse des jours chauds (> 25°C) et des jours très chauds (> 30°C).

  • La sécheresse :

Le déficit hydrique est la différence entre les précipitations et l'évapotranspiration des cultures, donc grossièrement la différence entre les entrées et sorties d'eau. C'est un bon indicateur pour caractériser la sécheresse. Nous avons ici le déficit hydrique sur la période déclarée de sécheresse par Jean Hamot, de 1979 à 2020. On remarque une légère augmentation de ce déficit sur les 40 dernières années, notamment sur l'année 2020 qui a été relevée par l'agriculteur.

 

  • L'excès d'eau :

Voici le cumul des précipitations sur la période déclarée comme excédante en eau par Jean Hamot. La tendance sur les 40 années est constante, mais on peut remarquer une baisse tendancielle de 1979 à 1993 environ, puis une période assez variable d'année en année. Enfin, depuis 2009 environ, les précipitations semblent augmenter très légèrement. De plus, le graphique ci-dessous, qui présente le nombre de fortes pluies (> 25 mm/jour) sur la période novembre-février, ne témoigne pas d'une augmentation tendancielle mais met en lumière de nombreuses fortes pluies sur les 10 dernières années. On remarque sur les deux graphiques que l'année 2019 ressort bien ; elle avait été relevée comme remarquable par Jean Hamot.

Quelles sont les ressources touchées sur la ferme ?

  • Pour l'aléa de sécheresse, ce sont les cultures d'été, mis à part le tournesol, qui sont les plus touchées. Le développement des plantes est limité par le stress hydrique, moins de grains sont formés par plante. Le rendement du sorgho est ainsi diminué de 50% les années sèches (2020 notamment). Pour compenser la sécheresse, Jean Hamot irrigue plus : 2 tours d'eau en plus (30mm/tour).
  • Fortes températures : Les fortes températures appuient les impacts de sécheresse. De plus, la chaleur grille les pollens de maïs, ce qui provoque des pertes de rendement par mauvaise pollinisation. Enfin, l'enchainement de pluie et de températures douces permet le meilleur développement des pucerons, qui peuvent poser quelques problèmes.
  • Excès d'eau : L'excès d'eau est un problème pour toutes les cultures d'hiver : le blé, l'orge et le colza. Les parcelles sont noyées, les pieds des cultures détruits, ou ayant un mauvais développement. Les pertes de rendements peuvent s'élever à 30%. Les semis peuvent être décalés après les fortes pluies, jusqu'en janvier par exemple.

 

Quelles évolutions climatiques à venir localement ?

L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques locales et illustrent les principaux enjeux climatiques pour un système grandes cultures.

Quatre indicateurs sont présentés en lien avec le système de Jean Hamot :

  • Les températures et précipitations annuelles :

Voici les projections à l'horizon 2050 pour les températures moyennes et les précipitations annuelles. On remarque une augmentation de la température et une diminution des précipitations à l'horizon 2050. Ainsi, les aléas de chaleur et de sécheresse semblent globalement avancer dans les 30 années à venir.

 

  • L'indice de stress thermique du 1er juin au 31 août :

Cet indice est un dénombrement des jours avec des températures maximales strictement supérieures à 32°C pendant une période de risque majeur (Juin à Septembre). Cette période englobe la floraison des cultures céréalières, également la pollinisation du maïs, pendant lesquelles ces cultures sont particulièrement sensibles au stress thermique. Comme on l'a vu plus haut, le pollen du maïs est grillé par la chaleur. De plus, toutes les cultures céréalières peuvent être soumise à un phénomène d'échaudage thermique, accident de croissance des grains, sous fortes températures estivales. On remarque donc une nette augmentation de ce nombre de jours à l'horizon 2050, ce qui pourrait causer des pertes de rendement supplémentaires sur les céréales de l'exploitation (maïs, blé, orge, avoine, sorgho).

 

  • Le déficit hydrique printanier :

Ici, le graphique présente le déficit hydrique de la période printanière. Cela correspond également aux étapes de montaison puis de remplissage de l'épi de céréale, et de floraison pour les légumineuses telles que le soja et la lentille, donc une période clé pour le rendement. Les légumineuses ont une forte sensibilité au stress hydrique durant cette période. On remarque que la tendance est à la baisse à l'horizon 2050, la sécheresse sera donc accrue, et de plus en plus tôt dans l'année.

 

  • L'excès d'eau après semis :

Cet indicateur présente le cumul des précipitations durant le mois de Novembre, qui évalue donc le risque d'excès d'eau après le semis de cultures d'hiver, comme le blé. Une quantité d'eau stagnante entraîne un déficit d'oxygène pour la plante : or les premières étapes du cycle de développement (germination – levée) sont très sensibles à l'hypoxie. Plus ce phénomène d'ennoiement continu perdure, plus les impacts seront importants, du retard de développement jusqu'à la destruction des pieds au-delà de 10 jours consécutifs, notamment pour le blé. C'est donc un aléa critique pour le blé, l'orge et l'avoine de l'exploitation. À l'horizon 2050 et d'après les projections, ces précipitations deviennent plus irrégulières et variables, avec une tendance à l'augmentation. Ainsi, le risque d'excès d'eau sera de plus en plus problématique d'après ces projections.

 

Quelles sont les pistes d'adaptation au sein de l'EARL Fond De Dèze ?

  • Contre la sècheresse et les fortes températures, Jean et Cyril Hamot irriguent certaines de leurs cultures. De plus, la couverture végétale permanente et les TCS limitent l'évaporation et gardent l'humidité dans le sol.
  • Contre l'excès d'eau, Jean Hamot n'a pas encore trouvé de piste d'adaptation.

De plus, l'exploitation a une bonne diversité de productions, ce qui permet de répartir le risque et d'assurer un revenu.

 

Contre l'excès d'eau, il serait peut-être intéressant de décaler les dates de semis, peut-être pour favoriser un semis plus précoce, qui permettrait un meilleur démarrage des plantes avant les fortes pluies, les rendant plus résistantes à cet aléa.

Il serait peut-être intéressant de développer de l'agroforesterie, pour amener de l'ombre dans les grandes parcelles (par effet bordure), et pour mobiliser l'eau en profondeur lors des étés secs. Cela participerait également à ramener de la biodiversité dans les parcelles, pour lutter contre les pucerons par exemple.

 

Pour aller plus loin :

Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt : https://agriadapt.eu/objetives/?lang=fr. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.

A l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.

 

  • Plateforme AWA :

 https://awa.agriadapt.eu/fr/