Témoignage Joseph-Marie Evrard Eleveur laitier à Seninghem (62)


Pourquoi avez-vous fait le choix du pâturage tournant dynamique ?

J'étais déjà en pâturage tournant depuis mon installation en 1995. J'avais envie d'améliorer la productivité de l'herbe, et j'observais que les vaches râlaient au bout de la 3ème ou 4ème fois dans la même parcelle, il y avait beaucoup de refus, moins d'appétence.

Il faut dire aussi que j'étais en système tout herbe, avec une installation de séchage en grange depuis 2009. Avec une alimentation basée sur l'herbe, ma motivation principale était d'améliorer la culture de l'herbe.

 

Quel a été le déclic et vos motivations pour franchir le cap ?

Le déclic, cela a été ma participation à une formation sur le pâturage tournant dynamique sur trois jours fin 2011. J'étais adhérent à Elvea62 depuis mon installation pour la charte des bonnes pratiques, et j'ai décidé d'aller à cette formation avec eux. En rentrant de la formation, on a tout de suite réfléchi au découpage des paddocks, l'accès à l'eau, etc. Elvea m'a accompagné, j'étais parmi les 4 premiers, et le seul éleveur laitier à me lancer dans le Pas de Calais.

 

Quelle a été votre démarche ? La transition a-t-elle été rapide ?

La transition a été très rapide. Une fois le schéma bien fait sur le papier, il n'y avait plus qu'à acheter et installer le matériel. J'en ai eu pour 4 000 € à peu près, et j'ai démarré en mars 2012 le PTD, seulement quelques mois après la formation.

Deux éléments ont facilité ma transition : j'étais déjà familier avec le pâturage, et j'avais un bloc de 15 ha accolé à la ferme. Aujourd'hui ces 15 ha sont découpés en paddocks de 30 ares, pour 45 vaches laitières. Les génisses ne sont pas en PTD, mais en pâturage tournant simple.

Les vaches laitières changent de paddocks toutes les 12 heures (paddock jour / paddock nuit). Au début on utilisait l'herbomètre pour savoir quand changer de paddock. Aujourd'hui, on parle plutôt du stade 3 feuilles. Personnellement je ne calcule plus trop.

Les seuls travaux effectués sont une fauche des refus au démarrage sur l'ensemble de la surface, après le 2ème ou 3ème passage des animaux en général, et un épandage de fumier tous les 2-3 ans.

 

Quels résultats avez-vous obtenus ?

Pour moi cela a été que du positif. Tout d'abord, une nette amélioration de la régularité au niveau du tank de lait. Avant, au bout de 3-4 jours sur le même paddock, on avait une baisse de lait. Aujourd'hui, la production est régulière. Je n'ai pas fait de mesure d'impact sur la qualité du lait car je ne suis pas en mesure de le valoriser économiquement. Le deuxième impact positif, c'est ma qualité de travail. Etant donné que les vaches laitières sont regroupées sur une petite surface, je ne passe pas de temps à les regrouper et je gagne beaucoup de temps dans leur déplacement d'une parcelle à l'autre, ou de la parcelle à la salle de traite. J'ai le sentiment aussi que les vaches sont mieux, elles ont toujours de la bonne herbe.

Aujourd'hui mon projet est de passer en PTD pour les génisses également. J'ai démarré cette année un projet d'agroforesterie combiné au PTD : les séparations de paddocks sont des plantations d'arbres (fruitiers, bois d'œuvre, arbres fourragers). L'objection est d'avoir une production supplémentaire (fruits, bois, fourrages), et également du BRF pour la litière des vaches. J'ai planté environ 200 mètres linéaires d'arbres sur 3-4 ha. J'ai dû doubler les clôtures (de part et d'autre des arbres), mais je ne perds pas beaucoup en surface car les vaches passent sous les fils pour pâturer.

 

Quelle ont été les difficultés techniques ? Quel choix as-tu dû faire ?

En période sèche, en juillet-août, il faut souvent complémenter. Je le fais soit en foin, soit en affouragement en vert. Sinon je n'ai pas eu de difficultés. Il m'est arrivé de faire une fauche car je m'étais fait rattraper par la pousse de l'herbe.

 

Quelles seraient tes recommandations pour d'autres agriculteurs ?

Je recommande tout d'abord de suivre une formation, c'est très important pour connaître la pousse de l'herbe et les pratiques à adopter. Dès le démarrage, la circulation des animaux doit être efficace. Il est également essentiel de bien dessiner les paddocks et de prévoir les aménagements.