Vulnérabilité des exploitations au changement climatique

Quels sont les aléas climatiques rencontrés ?

Description du climat local

Les analyses climatiques portent sur la période 1979 - 2020 (Source : Agri4Cast, JRC)

  • Les températures annuelles :

La hausse tendancielle des températures annuelles se confirme localement sur la période d'analyse, à l'image de la situation plus générale en France. Cette hausse concerne tous les paramètres (températures moyennes, minimales et maximales) et provoque ici un redémarrage de la pousse de l'herbe et une récolte du maïs plus précoce (voir plus bas). On observe également une hausse des jours chauds (> 25°C) et des jours très chauds (> 30°C).

  • La sécheresse :

Ce graphique présente le cumul des précipitations entre 1979 et 2020 sur la période déclarée de sécheresse par Stéphane Faidy : de mai à septembre. Ici, on observe que la tendance sur les 40 dernières années n'est pas un assèchement, au contraire : si on suit la tendance, les précipitations ont augmenté. On retrouve les cumuls de précipitations des mois de juillet et d'août séparés ci-dessous. Pour le mois de juillet, même si la variabilité interannuelle est forte, on visualise une augmentation tendancielle des précipitations jusqu'à 2010 environ, puis une diminution tendancielle sur les 10 dernières années, dont 2016 et 2020 qui sont très sèches. 2020 avait justement été déclarée comme année sèche par Stéphane Faidy. Le mois d'août, quant à lui, a une très forte variabilité interannuelle, et la tendance augmente. Ainsi, la sécheresse évoquée par l'agriculteur est difficile à percevoir avec ces graphiques. On suppose que la répartition de l'eau est de plus en plus irrégulière : il peut y avoir des semaines sans pluie, et des épisodes de fortes pluies intermittentes. Les courbes en dents de scie semblent confirmer cette hypothèse, en nous indiquant une forte variabilité interannuelle.

  • L'excès d'eau :

Voici le cumul des précipitations sur la période déclarée comme excédante en eau par Stéphane Faidy. On remarque une augmentation tendancielle des précipitations sur les 40 dernières années. Le graphique ci-dessous présente le nombre de fortes pluies (>25 mm par jour), qui augmentent également. On remarque sur les deux graphiques que les années 2019 et 2020, qui avaient été citées par l'éleveur comme critiques, ont été effectivement sujettes à de fortes pluies. Ainsi, l'aléa d'excès d'eau tend à augmenter.

Quelles sont les ressources touchées sur la ferme ?

  • Pour l'aléa de sécheresse, les prairies de l'exploitation ont une pousse de l'herbe plus limitée durant les périodes sèches, qui peuvent durer plusieurs semaines. Ainsi, le rendement foin baisse. De plus, le maïs arrive à maturation plus tôt, du fait du stress hydrique. En 2020, il a été ensilé le 10 août.
  • Fortes températures : Les fortes températures et le vent viennent accentuer les impacts de la sécheresse sur le rendement et l'état global des prairies.
  • Excès d'eau : Les excès d'eau ont un impact sur les méteils et le blé cultivé sur l'exploitation. Les céréales sont détruites par les excès d'eau après semis, ou ne profitent pas d'un bon démarrage. Les dates de semis peuvent être aussi retardés de plusieurs semaines. En 2019, deux tiers des surfaces de blé ont été perdues (10 ha) à cause des excès d'eau.  

 

Quelles évolutions climatiques à venir localement ?

L'inertie climatique à l'échelle du globe implique une continuité des évolutions climatiques déjà observées localement dans les prochaines décennies. Les Indicateurs Agro-Climatiques suivant sont construits à partir des projections climatiques locales et illustrent les principaux enjeux climatiques pour un système d'élevage bovin viande et ovin lait.

Cinq indicateurs sont présentés en lien avec le système de Stéphane Faidy :

  • Les températures et déficit hydrique annuel :

Voici les projections à l'horizon 2050 pour les températures moyennes et le déficit hydrique annuel. Le déficit hydrique est la différence entre les précipitations et l'évapotranspiration des cultures, donc grossièrement la différence entre les entrées et sorties d'eau. C'est un bon indicateur pour caractériser la sécheresse. On remarque une franche augmentation des deux paramètres. Ainsi, les aléas de chaleur et de sécheresse semblent globalement avancer dans les 30 années à venir.

 

  • Les précipitations printanières :

Cet indicateur présente les précipitations locales de la période printanière. Les situations déjà observées de sécheresse notamment en 2020 vont se poursuivre au cours des prochaines décennies, avec une forte baisse des précipitations à l'horizon 2050. Ce manque de précipitations conduisant à un été sec pourra renforcer les impacts sur prairies déjà observés actuellement.

 

  • La date de redémarrage de pousse de l'herbe :

Même si la date de redémarrage de la pousse de l'herbe est assez variable d'année en année, elle semble devenir plus précoce dans un futur proche, tournant autour de fin janvier. Cela est induit par la hausse des températures. Il sera peut-être intéressant de sortir les animaux en s'adaptant au stade de développement des prairies pour ne pas perdre de valeur nutritive.

 

  • L'excès d'eau après semis :

Cet indicateur présente le cumul des précipitations durant le mois de Novembre, qui évalue donc le risque d'excès d'eau après le semis des méteils. Une quantité d'eau stagnante entraîne un déficit d'oxygène pour la plante : or les premières étapes du cycle de développement des céréales d'hiver (germination – levée) sont très sensibles à l'hypoxie. Plus ce phénomène d'ennoiement continu perdure, plus les impacts seront importants, du retard de développement jusqu'à la destruction des pieds au-delà de 10 jours consécutifs. À l'horizon 2050 et d'après les projections, ces précipitations deviennent plus irrégulières et très variables, avec une légère tendance à l'augmentation. Ainsi, les problématiques d'excès d'eau et de décalage de dates de semis poseront sûrement de plus en plus problème d'après ces projections, notamment sur les céréales d'hiver comme le blé de l'exploitation.

 

  • Le stress thermique des animaux (Indice Température Humidité) :

L'Indice Température Humidité (ITH) évalue le couple température et hygrométrie pour déterminer le niveau de stress thermique des animaux. Sur ce graphique figure le nombre de jours de stress thermique par an. Ainsi, d'après ces projections, l'évolution du climat local va faire augmenter le nombre de jours de stress thermique des animaux. Actuellement, cela ne semble pas être un problème sur l'exploitation (d'après les déclarations de Stéphane Faidy), mais cela pourrait le devenir avec cette augmentation. Ce sont des jours où les animaux seront moins productifs en lait, et la croissance des veaux sera ralentie.

 

Quelles sont les pistes d'adaptation au sein de l'EARL Charchenay ?

  • Contre la sècheresse, Stéphane Faidy adapte ses dates de cultures et de pâturage. Celui-ci est mis en place plus tôt et est plus tardif, mais les bêtes sont rentrées en été lors de périodes trop sèches et trop chaudes. La culture de maïs se voit réduite progressivement, au profit de sorgho fourrager, qui est moins gourmand en eau, et qui peut plus facilement repartir après un stress.
  • Contre les fortes températures, le troupeau de l'exploitation profite de l'ombre apportée par les nombreuses haies.
  • Contre les excès d'eau, Stéphane Faidy a souscrit à une assurance récolte. Pour compenser des pertes de récolte céréales, l'agriculteur achète aussi de la paille.

 

Pour aller plus loin :

Cette approche climatique a été possible grâce aux résultats du projet LIFE+ AgriAdapt : https://agriadapt.eu/objetives/?lang=fr. Ce projet a pour objectif d'évaluer la vulnérabilité des principales productions agricoles face au dérèglement climatique et aussi de proposer des plans d'adaptation durables pour accroitre la résilience des systèmes agricoles.

A l'issue de ce programme européen, une plateforme web (AWA) a été conçu pour valoriser les principaux résultats du suivi des 120 fermes pilotes. Cette plateforme permet donc d'accéder à de nombreux autres indicateurs (observations, projections, indicateurs agro-climatiques) par une entrée cartographique pour différentes localités géographiques en France comme en Europe. Et de proposer des mesures d'adaptation durables envisageables à l'échelle des exploitations agricoles et des systèmes de productions.

 

  • Plateforme AWA :

 https://awa.agriadapt.eu/fr/

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Contact

Stéphane FAIDY

Earl Charchenay
9 Route des Fontenelles - Charchenay
79400 Saint-Martin de Saint-Maixent
Email : earl.charchenay@gmail.com