Cultiver du riz et du blé dur sans engrais et sans pesticides

LA DÉMARCHE

Rizière en eau

Ce système de polyculture sans apport d'engrais ni chimique, ni organique extérieur et bien sûr sans pesticide fonctionne depuis de nombreuses années prouvant ainsi sa faisabilité.

Il a été rendu possible grâce à la mise en place d'une rotation longue et adaptée au site comprenant notamment la culture de luzerne comme pivot et pourvoyeuse d'azote avec l'engrais vert à base de trèfle de perse. Cette rotation qui fait alterner les familles, les cultures d'hiver et d'été et la submersion, associée à des pratiques de faux semis et de désherbage mécanique permet un contrôle des adventices tout en nécessitant une attention constante. Le riz est ainsi implanté après 3 à 4 ans de luzerne.

Les terres labourables qui occupent 110 ha sont conduites avec un assolement septennal : luzerne (deux à trois ans) ; riz ; tournesol ou sorgho ; blé (dur et tendre). Un engrais vert à base de graminée et légumineuse (trèfle de perse semé fin juillet à raison de 7 à 8 kg/ha) est mis en place entre la céréale à paille et la culture d'été. Mais il est difficile d'implanter un couvert derrière le riz du fait de la récolte tardive. Le rendement de l'engrais vert peut être estimé entre 5 et 6 T MS et équivaut à environ 100 unités d'azote. Cet engrais vert contribue à décompacter les sols et activer la vie microbienne. L'apport de fumier a été arrêté il y a 10 ans car il apportait des mauvaises graines (chénopodes).

Cette rotation offre, d'après Julien Cartier un bon compromis au point de vue “rentabilité/limitation des adventices/fertilisation“ des parcelles cultivées.  D'autres cultures interviennent certaines années comme le pois chiche ou le blé tendre. La culture du colza a aussi été tenté entre le riz et le blé dur mais sans résultat probant. La luzerne est implantée sur sol nu en mars ou semée dans le blé.

Plusieurs variétés de riz IGP Camargue (riz long, riz rouge, riz rond et riz noir) sont produites et commercialisée sur le domaine. Le riz est semé à partir de fin avril jusqu'à début mai, à la volée dans l'eau ou à sec. L'eau utilisée dans les rizières est pompée dans le grand Rhône par la pompe du domaine. L'eau circule ensuite via un réseau d'irrigation. Le drainage se fait par les fossés qui séparent chaque parcelle. Le riz permet de déssaler les parcelles.

Le labour se fait sur 12-15 cm puis la parcelle est nivelée. Le riz est semé de fin avril à début mai à la volée à sec puis roulé. Le remplissage en eau des parcelles se fait directement après le semis. Le niveau d'eau est géré en fonction du stade du riz.

Il est apporté en moyenne 15 à 20 000 m3 d'eau dans le riz sur la période culturale. La récolte se fait vers la mi-octobre.  Le riz est généralement moissonné l'après-midi pour faire baisser son humidité et si possible après une période de mistral, de façon à réduire les frais de séchage. Le riz est séché et stocké et usiné avant d'être conditionné.

Le riz sur riz a été arrêté à cause des trop fortes pressions d'adventices. Même avec une rotation de 7 ans le contrôle des adventices, panisses (Echinochloa crus-galli), les triangles (Scirpus mucronatus, Cyperus difformis et Scirpus maritimus) mais aussi le chiendent, reste un défi. Parmi les solutions pour le futur : le repiquage mécanique.

La culture du riz est difficile et Julien doit faire face à de nouvelles adventices exotiques envahissantes comme l'Heteranthera reniformis (introduite en Camargue en 1989) et la Jussie en fin de cycle.

Concernant l'irrigation, il faut quotidiennement contrôler la teneur en sel de l'eau pompé dans le Rhône. Au delà de 1,8 g/l on arrête les pompes. En effet lorsque le Rhône est bas en été, il arrive que l'eau de mer remonte en profondeur obligeant à stopper le pompage car la teneur était montée au-delà de 2g/l (jusqu'à 4g chez un voisin). Cela est arrivée une fois cette année 2022.

Le changement climatique qui induit une baisse du débit du Rhône ne vas pas arranger les choses à terme avec une eau qui devient de plus en plus salée.

Au-delà de 3 panisses/m2 ou 100 triangles/m2 au stade 3 feuilles du riz, le poids des adventices à la récolte est très souvent supérieur à 3 t/ha. Mais panisses et triangles n'ont pas la même influence sur le rendement du riz. Ce dernier ne dépasse pas 30 q/ha si plus de 6 panisses sont présentes au mètre carré. Pour les triangles, on peut avoir une densité relativement plus élevée sans que le rendement soit affecté. Une analyse plus fine reste à mener pour différencier la dynamique et la nuisibilité de Scirpus maritimus, plante à rhizomes.

On a aussi un peu de pyrale du riz (Chilo suppressalis), papillon crépusculaire mais les impacts sont négligeables compte tenu des possibilités importantes de compensation par tallage. 5 nichoirs à chauve-souris contribuant à réguler les pyrales ont été installés.

Les travaux menés en Espagne dans le delta de l'Ebre par l'association Galanthus, le Musée des Sciences Naturelles de Granollers et l'Association de Défense Végétal du riz du Delta de l'Ebre, démontrent clairement que si l'on réussit à établir des colonies de plus de 12 chauves-souris (notamment la pipistrelle pygmée) par hectare dans les rizières, le contrôle sur la pyrale fonctionne. (cf la publication)

Les larves perforent les tiges pour s'alimenter des tissus internes de la plante de riz. Ce qui provoque un affaiblissement important des plantes affectées, tellement que les épis sont significativement moins productifs que celles des plantes saines. La pyrale se développe jusqu'à 3 générations en un an. Entre fin avril et mi-juin, apparaissent les premiers adultes de la saison, coïncidant avec les semailles et les stades initiaux de développement végétatif des plantes de riz. Lesquels proviennent des larves, majoritairement, qui auront hiberné à l'intérieur des tiges de plantes de roseau à balais. Ces adultes donnent naissance à la première génération de larves. De juillet et jusqu'au début du mois d'août, la seconde génération fait son apparition, qui sera à l'origine des larves de la troisième génération. Une bonne partie de ces larves se développent d'une manière parallèle à la fleuraison du riz et, à partir de fin août.

INTÉRÊTS DU POINT DE VUE DE L'AGRICULTEUR

Points forts

Points faibles

Environnementaux

  • Rotation longue permettant de cultiver du riz
  • Maintien d'un sol couvert toute l'année (couvert avant la culture d'été
  • Moins de mécanisation
  • Maintien de prairies permanentes
  • Implantation des luzernes
  • Contrôle des adventices sur la luzerne
  • Délai d'intervention des entreprises
  • Attaque de sangliers
  • Battues de sanglier
  • Tester de nouvelles cultures